L’imposture présidentielle française

La démocratie en marche

Pour beaucoup de Français, l’élection présidentielle est un moment fort et un symbole évident de la vivacité de la démocratie en France. Au premier abord, la théorie et les principes sont louables, paraissent tenir parfaitement debout.

Mais quelle est donc cette théorie ? Passons en revue ses principes de base.

D’abord, le peuple élit qui il veut. Il est souverain dans le choix de son chef. De toute évidence, il choisit quelqu’un qui a les qualifications, l’intelligence, le charisme, le panache même, pour endosser la fonction présidentielle. Cela ne peut pas être n’importe qui. Ainsi, il est bien normal que nous n’ayons pas de présidents ouvriers, machinistes, profs, serveuses ou serveurs, infirmières ou infirmiers. On appelle cela la « méritocratie ». Nous voulons les meilleurs, les plus capables, pour diriger le pays.

Il est donc parfaitement normal que tous les présidents aient une formation ad hoc. L’ENA. Science Po. Et de préférence un homme fort d’un certain âge, qui va en imposer et à qui on ne peut pas conter d’histoires. Au passage, la France n’a jamais eu de présidente. Jusqu’à maintenant.

Le peuple choisit l’individu qui brille le plus par sa carrure, et les mauvais présidents ne sont pas réélus, comme Sarkozy ou Hollande. Le chef est faillible, il sera écarté en cas de manquements aux prochaines élections.

Tout cela semble parfaitement logique.

Un goût amer

Il y a tout de même un hic. Il suffit de faire un petit sondage autour de soi pour s’en apercevoir. « La démocratie fonctionne-t-elle parfaitement ? Permet-elle d’éviter les inégalités ? Le Gouvernement élu met-il en œuvre tous les désirs des Français ? » En toute logique, il le devrait. Sinon il ne sera pas réélu. Et pourtant…

Une très récente enquête Ifop est plutôt parlante. Difficile de dire avec le graphique suivant que tout le monde est content :

Réponses de l’ensemble des Français à la question : « Diriez-vous qu’en France la démocratie fonctionne très bien, assez bien, pas très bien ou pas bien du tout ? » Source : IFOP

D’ailleurs, le taux de mécontents varie au cours du temps, ils étaient plus de 70 % en 2014 et 2016 !

Les réponses surprennent le plus souvent. Le constat d’échec est flagrant. Une large majorité semble avoir l’intuition qu’il y a quelque chose qui cloche. Pourquoi, alors, ne pas en changer ? La réponse, souvent sans appel, ne se fait pas attendre : « c’est le meilleur modèle qu’on connaît, donc il faut faire avec ».

Des échecs partout ailleurs

Cela rappelle trop toutes ces tentatives occidentales d’amener la « démocratie » un peu partout dans le monde. Avec sans cesse des effets particulièrement ravageurs, des pays transformés en ruines, politiquement et économiquement. Et ce malgré la tenue « d’élections démocratiques » dans les pays concernés.

Il semble que la « démocratie » telle que nous la concevons mène toujours aux mêmes dysfonctionnements. Partout, elle autorise des empires financiers à prendre le dessus. Les multinationales n’en font qu’une bouchée grâce à des lobbys toujours plus puissants. Elle court systématiquement après le petit voleur de pâtes pour quelques euros parce que le frigo est vide. En revanche, elle ne touche pas au milliardaire qui pourtant provoque des milliards de manque à gagner pour l’État en évasion fiscale et autres malversations, qui provoquent en retour inégalités, pauvreté, insécurité. Elle laisse en liberté les politiciens corrompus. Au lieu de rassembler les peuples, elle les divise, parfois très profondément. Elle s’attaque systématiquement à des problèmes secondaires, sans jamais régler l’essentiel.

Elle finit même par justifier des mesures extrêmement autoritaires dans certaines situations. Mais c’est pour notre bien, évidemment. Sous prétexte de « sécurité », d’anti-terrorisme. Ou bien « sanitaires ». Ou encore de « sauvegarde de l’emploi ». Malgré tout, on sent que le système est… perfectible, c’est le moins qu’on puisse dire !

Partout, le terme « démocratie » est associé à « élections ». D’ailleurs, on le confirme généralement par des expressions du type « On a les dirigeants qu’on mérite ». Mais est-ce bien ça, l’élection de « dirigeants », la démocratie ?

C’est quoi, une démocratie ?

Partons de la définition large du terme :

Régime politique dans lequel le peuple dispose du pouvoir souverain

Ainsi, c’est un régime politique où les décisions communes sont prises par le peuple.

Pourtant, aujourd’hui, ce n’est pas le peuple qui prend réellement les décisions. Ce sont ses « représentants élus ».

Ah. Nous sommes donc dans un « système représentatif », une République. Certains parlent de « démocratie représentative ». Pour qu’il s’agisse réellement de démocratie, il faudrait que le peuple ait le contrôle total sur ses représentants, ce qui n’est pas du tout le cas, comme nous allons le voir plus loin.

D’autres systèmes représentatifs…

Mais alors… en quoi est-ce que la France différerait-elle donc tant de la Russie ? En effet, la Russie a également un président élu, un gouvernement et des ministres, un parlement d’élus aux suffrage direct, la Douma. Cette dernière a d’ailleurs le pouvoir de contester les décisions gouvernementales. C’est une république fédérale, comme l’Allemagne. L’organisation est un peu différente des pays occidentaux, mais sur l’essentiel, cela revient strictement au même.

Même la Chine fonctionne sur un système parlementaire, avec des élections plus indirectes, mais cela ne change pas grand-chose, dans le fond.

Pour rappel, en France, le Gouvernement a aussi le droit de s’opposer à une loi votée par le Parlement. Il peut également forcer ses propres lois par le fameux mécanisme de l’article 49-3. Dans ces cas-là, le peuple n’a rien à dire, il devra patienter jusqu’aux prochaines élections s’il n’est pas content.

La corruption

Mais alors, pourquoi diable la Chine et la Russie seraient des dictatures et la France une démocratie ? Pour faire la distinction, on va s’appuyer sur d’autres critères, comme le degré de corruption. Évidemment, les gouvernants russes et chinois sont corrompus, les élections sont truquées, c’est en cela que ce sont des dictatures.

Pourtant, en terme de corruption, la France n’est certainement pas en reste ! Chacun de nos présidents a été mêlé de près ou de loin à des scandales. Parmi les élus, on ne compte plus les procès. Le Parlement vote régulièrement des lois qui favorisent les inégalités – où est donc l’égalité ? De la même manière, il bloque des lois qui pourtant serviraient le peuple. Par ailleurs, les parlementaires votent eux-mêmes à une large majorité leurs propres augmentations. Ce n’est pas le même refrain lorsqu’il faut augmenter le SMIC. N’est-ce pas du conflit d’intérêt majeur et parfaitement évident ?

Emmanuel Macron lui-même navigue dans des eaux peu claires. Il a vendu la sécurité nationale de la France aux Américains avec l’affaire Alstom. C’est également un maître manipulateur, comme on peut le constater dans l’affaire des journalistes du Monde. Au passage, il n’a rien à envier à un Poutine dans les tentatives de faire taire quiconque s’oppose à lui. Deux des épisodes de « Off Investigation » ont déjà été censurés par Youtube. La liste est bien trop longue. Alexandre Benalla, l’un de ses plus proches gardes du corps ayant commis d’innombrables fautes est totalement protégé par le pouvoir, quelles que soient ses exactions. Y compris en permettant à l’intéressé de vider son appartement de ses preuves avant son inspection par la police. On se croirait dans un mauvais scénario de dictature.

La liberté d’expression

Alors, très certainement, on peut aussi s’intéresser à un autre axe : la liberté d’expression. On peut dire qu’elle est mieux respectée en France qu’elle ne l’est en Russie ou en Chine. Il semblerait pourtant que c’est valable uniquement tant qu’il ne s’agit que de paroles. En d’autres termes, tant que c’est du blabla, nous pouvons toujours dire ce que nous voulons. Mais il ne faudrait pas que cela se traduise en actes.

Exemple criant : tous ces gilets jaunes qui se sont fait tirer comme des lapins, alors que la majorité ne représentait aucun danger. On ne compte plus les blessés, les éborgnés, les mains arrachées. Combien de mains arrachées en Russie ? Combien d’éborgnés ? Aucun, à ma connaissance. En Hollande, un manifestant est même abattu à balles réelles.

Et ceux qui dérangent vraiment l’ordre établi, comme les lanceurs d’alerte, sont persécutés. Stéphanie Gibaud, employée dans une banque, se retrouve dans une situation très précaire après avoir dénoncé des pratiques illégales de son employeur. Mais où est donc l’« État protecteur », garant des libertés et de la transparence ? La France n’a jamais offert l’asile politique à Julian Assange. Ni à Edward Snowden. Qui a été accueilli, ironie du sort, en Russie. Bien évidemment, il ne représente pas une menace pour l’État russe, même s’il en dénonce parfois les écarts.

On sent clairement le « deux poids, deux mesures ». La Russie et la Chine sont des dictatures et tout y va très mal. La France est une démocratie et tout va très bien, Mme la Marquise.

Museler les trouble-fête « à l’ancienne »…

Certes, Poutine a ses méthodes pour se débarrasser des journalistes ou politiciens. C’est un ancien du KGB, la vieille école. Une balle entre les yeux. Ou bien le si classique poison. Au mieux, l’emprisonnement.

Mais à moins d’être aveugle, il est loin d’être le seul. Nous avons également droit à ce genre d’épisodes dans les pays occidentaux. Ils sont certes un peu moins « flagrants ». On se rappelle trop facilement des disparitions assez curieuses de Coluche ou Balavoine, ainsi que Bérégovoy. Plus récemment, Bruno Gaccio a bien failli y passer aussi. Et ceux qui disparaissent en prison ne sont pas en reste. Comme par exemple récemment Jean-Luc Brunel en France et son alter ego Epstein aux États-Unis.

… et beaucoup plus simplement

Pourtant, il y a une recette extrêmement simple et efficace pour se débarrasser des voix « encombrantes » : les médias. Il suffit de virer tel journaliste ou animateur qui sort un peu trop du rang, voire le reléguer à un média « de seconde zone » où sa voix portera peu. Pour les autres, le simple fait qu’ils ne passent pas sur les grands médias les rend muets. Littéralement.

Patrick Sébastien. Natacha Polony. Les « guignols de l’info », supprimés. Frédéric Taddeï, obligé de passer sur RT pour avoir le droit d’inviter qui il veut dans son émission. Le monde à l’envers ! Et au pire, on demande à la justice de museler les plus gênants, comme Denis Robert avec l’affaire Clearstream. Là encore, la liste est trop longue.

Ce qui est vrai pour les temps de parole lors de l’élection présidentielle l’est évidemment pour tout le reste. Il faut et il suffit que les médias focalisent l’attention sur un sujet pour éviter de parler du reste. C’est digne des techniques de prestidigitation. Regarde bien ma main droite, et pendant ce temps, ma main gauche va chercher une balle dans ma poche. Et hop, le tour est joué.

Or, il se trouve que tous les principaux médias en France sont entre les mains d’une minorité, une dizaine de milliardaires. Et l’État, qui travaille pour son compte – ou plus exactement pour le compte des « Élus ». Eux-mêmes à la solde des milliardaires précités.

Le Président Providentiel

Dans mon roman, l’ascension au pouvoir du Président est justement due à une exposition accrue dans les médias. Cela aura pu paraître un peu tiré par les cheveux pour certains lecteurs.

C’est pourtant ce qui s’est passé avec Emmanuel Macron en 2017. Certes, il a été Ministre de l’Économie peu avant, mais il était quasiment inconnu des Français. Et ceux qui le connaissaient ne l’appréciaient pas forcément, ce qui peut se comprendre au vu de certaines mesures hallucinantes qu’il a prises. Comme par exemple le remplacement des trains par des bus… mesure qui a d’ailleurs subi un rétro-pédalage sous son mandat présidentiel. En 2010, il avait même proposé de supprimer la dissuasion nucléaire française, « pour faire des économies ». Heureusement, Jacques Attali était là pour le remettre à sa place.

Je n’aurais jamais imaginé un jour écrire une phrase faisant l’éloge de Jacques Attali !… qui l’eût cru ?

Dans les faits, n’importe quelle personne qui connaît un minimum les artifices de la rhétorique est présidentiable. De ce point de vue, Emmanuel Macron s’y connaît. Il a particulièrement appris cet art à la banque Rothschild, comme l’explique son directeur.

Ainsi, il est tout-à-fait réaliste que même un inconnu comme Pierre puisse se présenter et gagner les élections présidentielles. Il faut et il suffit qu’il soit adoubé par une dizaine de milliardaires.

Qui sont nos « représentants »?

Ce sont donc nos oligarques, au contrôle des médias, qui font et défont les présidents. Le peuple ne fait que suivre les candidats qui lui sont présentés, à hauteur de leur exposition dans les médias. À l’heure où j’écris cet article, le monde est une grande mosaïque d’oligarchies.

Oui, j’ai bien écrit « oligarchies ». Définition :

Gouvernement politique où l’autorité souveraine est entre les mains d’un petit nombre de personnes

Alors, en Russie, oui, sans doute. En Chine, aussi. Ah, en Corée du Nord, bien évidemment. Et puis, certainement d’autres états corrompus. Mais en France, sûrement pas, tout de même ?

Une caste dirigeante

Certes, les dirigeants ne se passent plus le pouvoir de père en fils comme le faisaient jadis les rois.

Dans les faits, les « représentants » en France forment une caste à part entière. Ils sont constitués d’individus au statut particulier : les politiciens. Ces gens font carrière en politique, leur fonction est de « représenter ». Ils ne savent rien faire d’autre. Et ils sont sélectionnés au sein d’un club bien privé. Club du Cercle. Young Leaders. Institut Montaigne. Il faut être introduit aux bons endroits et auprès des personnes les plus influentes. Et une fois élu, on voit mal celui qui a accédé à la fonction présidentielle trahir ceux-là mêmes qui l’ont fait élire.

Des élus « hors sol »

C’est là que le glissement sémantique entre « représentant » et « représentatif » s’effectue bien trop souvent dans les têtes. Justement, ces « représentants » ne sont en rien représentatifs de l’ensemble de la population pour laquelle ils sont censés être les porte-voix.

Ils ne l’ont d’ailleurs jamais été. Pendant la Révolution Française, lors des États Généraux, ce sont déjà principalement des notables qui représentent le Tiers État. À l’époque, cela pouvait éventuellement se justifier. Et encore. Le fait est que la majorité des membres du Tiers État était illettrée et aurait eu bien du mal à défendre ses propres intérêts face à des professionnels de la magouille juridique.

Le problème, c’est qu’un « représentant » qui n’a pas les mêmes intérêts que celui qu’il prétend défendre se trouve en conflit d’intérêts. Il est logiquement porté à défendre les idées favorables à son statut et à sa caste en général. Ces idées sont potentiellement totalement opposées à celles qui favoriseraient le peuple.

L’absence de contrôle

On pourrait éventuellement parler de démocratie si effectivement le peuple avait le pouvoir total sur ses représentants. Or, dans le système français actuel, il n’en est rien. Si un élu trahit le peuple, ce dernier n’a aucun moyen de recours. Impossible de révoquer un élu ni même une loi scélérate. Impossible de toucher à la Constitution pour y ajouter un peu de contrôle sur les élus. Le seul levier du peuple est d’attendre les prochaines élections.

Ce ne serait pas forcément catastrophique s’il s’agissait d’un cas isolé : il suffirait de voter pour un « bon » représentant la prochaine fois.

Mais lorsque c’est l’ensemble du corps des « représentants » qui trahit sans cesse, et qu’il n’y en a pas un pour rattraper l’autre, le peuple se trouve effectivement totalement impuissant. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle l’abstention augmente à chaque élection. À force d’être trahi de manière répétée, le peuple finit par comprendre qu’il ne sert à rien d’élire un pantin qui n’en fera qu’à sa tête, comme ses prédécesseurs.

Une large portion de citoyens comprennent que, en tant qu’électeurs, ils n’ont en réalité aucun pouvoir.

Le piège de l’élection présidentielle

En France comme ailleurs, les artifices permettant de perpétuer cette caste au pouvoir sont finalement très simples. La principale épine dans la « démocratie » est l’élection présidentielle elle-même ainsi que ses modalités.

J’entends déjà des voix qui protestent : « Pas du tout, c’est le peuple qui décide qui il élit ». Par ailleurs, l’élection est très contrôlée, avec l’Arcom (ancien CSA) qui veille au grain et le vote aux urnes est l’un des plus fiables au monde.

Aux États-Unis, la manière d’élire le Président est particulièrement tirée par les cheveux. Mais en France, nous votons directement pour nos dirigeants, et chaque bureau de vote est dûment contrôlé par tous les partis. Pour l’instant, pas de vote par correspondance, pas de vote électronique, il semble impossible de tricher.

Pourtant, nous allons voir que le système des élections en France est loin d’être neutre, en particulier celui de l’élection du Président de la République. Il est truffé de pièges, de subtilités qui peuvent aisément être exploitées pour faire voter le peuple « comme on le leur dira », comme disait Tocqueville.

Analysons ensemble ce système pour comprendre pourquoi depuis plus d’un demi-siècle, la France part à la dérive :

  • pertes de souveraineté, tant avec l’euro que la soumission à l’UE,
  • inégalités et insécurité grandissantes,
  • système de santé et infrastructures publiques qui tombent en ruine,
  • perte de résilience et dépendance accrue à des pays étrangers,
  • libertés de plus en plus bafouées sous divers prétextes,
  • etc.

Les tours de magie

L’élection présidentielle se déroule en plusieurs temps :

  • présélection de candidats : primaires,
  • obtention de soutiens municipaux,
  • premier tour,
  • deuxième tour.

Chacune de ces étapes est parsemée d’embûches. Et celles-ci rendent le beau tableau « le peuple souverain élit son président » un peu… terne.

Présélection de candidats

La logique des partis impose que chaque camp politique choisisse un représentant et un seul, pour avoir un peu de chance de faire le poids face aux autres partis. L’idée est de choisir celui qui fait le plus consensus. Au risque de choisir le plus gros moulin à vent qui ne propose rien pour éviter de froisser quiconque.

Par ailleurs, cette présélection est totalement livrée à l’imagination des différentes forces en puissance. Dans certains partis, c’est un leader auto-proclamé. Dans d’autres partis, c’est celui qui est désigné par ses pairs comme « le meilleur ». D’autres organisent des élections internes dont les modalités peuvent parfois être douteuses.

Dans la mesure où cette étape n’est pas encadrée, il n’est pas toujours facile de comprendre pourquoi et comment tel ou tel candidat a été mis en avant plus qu’un autre.

Déjà, très tôt dans le calendrier électoral, les médias ont une influence énorme. Évidemment, quiconque est mis en avant plus que les autres dans les médias a beaucoup plus de chances de l’emporter au sein de son propre parti que les autres.

À ce moment, l’Arcom, anciennement CSA, commence tout juste à comptabiliser les temps… pour rire. Dans la mesure où il n’y a pas encore de candidats « officiels », ça compte pour du beurre. Et pourtant…

Les parrainages

Être sélectionné au sein de son propre parti ne suffit pas. En effet, dans un monde sans filtre, on pourrait parfaitement imaginer avoir 500 candidats à la présidentielle. Cela rendrait l’organisation de la campagne à l’échelle nationale un peu complexe, sans aucun doute. Pour éviter d’avoir trop de candidats, ceux-ci doivent obtenir des promesses de soutien auprès des maires de France. Cela n’a pas toujours été le cas, pour avoir l’historique, c’est ici.

Cette mesure n’est toutefois pas anodine. En effet, elle détermine réellement le choix des « représentants » pour qui les électeurs vont ensuite pouvoir voter. Quiconque n’obtient pas les parrainages nécessaires n’aura plus aucune voix dans la campagne. Pire encore, le candidat déchu risque tout simplement de perdre en crédibilité pour le reste de sa carrière.

Divers paramètres entrent en jeu ici, qui ont subi des modifications aux impacts majeurs.

Première barrière officielle

Le premier levier pour mettre les bâtons dans les roues de candidats « non voulus » par l’oligarchie est tout simplement de demander un nombre assez grand de parrainages. Seuls les candidats parvenant à récolter suffisamment de parrainages ont alors une chance d’exposer leurs idées devant les Français. Les autres, tout comme les journalistes gênants, n’ont plus qu’à parler dans leur coin. Tant que leur voix ne porte pas, ils ne représentent aucun danger.

Pour résumer, le nombre de signatures nécessaires a augmenté progressivement. De 50 en 1958, elles sont passées à 100 puis à 500 en 1976.

Pour ajouter un peu de difficulté, il faut également que les parrainages proviennent d’un nombre suffisant de départements. Ceci évidemment pour éviter qu’un candidat ratisse les petits villages de sa région et soit totalement inconnu ailleurs.

Deuxième barrière officielle

Le nombre de signatures s’est avéré être une mesure insuffisante pour contenir le nombre de candidats – y compris les plus gênants. Une nouvelle mesure a été mise en place dès 1976, avec pour prétexte « la transparence de la démocratie ». Cette mesure est déterminante malgré son air innocent : il s’agit de publier les noms des soutiens pour chaque candidat.

Effets directs…

En apparence, 500 signatures peut paraître un nombre assez faible au regard du nombre de maires en France – plusieurs dizaines de milliers. Pour un maire, donner une signature n’a aucun impact personnel tant que cette signature reste anonyme. Or, dès que les noms des soutiens deviennent publics, les élus mettent leur tête en jeu. En effet, soutenir un candidat qui n’aura aucun poids peut avoir un impact négatif non négligeable sur la future carrière politique d’un élu.

C’est en particulier le cas pour les candidats des extrêmes. Si effectivement cela augmente la transparence, l’autre effet immédiat est de permettre de clouer publiquement au piloris les élus ayant soutenu des candidats jugés « extrémistes ».

Évidemment, le but recherché, limiter les candidats, est atteint. Les candidats les plus extrêmes ont beaucoup de mal à obtenir des soutiens. Il en va de même avec des candidats « loufoques » qui n’ont aucune chance. À la rigueur, cela peut se justifier dans ces cas-là. Malheureusement, cela va plus loin. En effet, pour un maire qui a été élu le plus souvent avec le soutien d’un parti politique, il est extrêmement difficile d’apporter un soutien à une voix dissonante. Bon courage pour la suite de sa carrière !

… et Effets de bord

De mon point de vue, cette mesure a favorisé la consolidation du Front National, en éliminant mécaniquement toute tentative de concurrence. Il semblerait toutefois que cette tactique ait échoué en 2022 : Marine Le Pen a maintenant deux adversaires qui vont lui « voler » des voix : Éric Zemmour et Nicolas Dupont-Aignan. Il n’est d’ailleurs du coup pas étonnant que Florian Philippot ait fait un « flop » en terme de signatures…

De la même manière, de l’autre côté du spectre, Jean-Luc Mélenchon se retrouve avec trois épines dans le pied, même s’ils « pèsent » moins que leurs équivalents à droite : Nathalie Arthaud, Philippe Poutou et Fabien Roussel. On notera d’ailleurs que Christiane Taubira, qui aurait également pu faire de l’ombre à gauche, est loin d’avoir obtenu ses 500 signatures malgré une couverture médiatique correcte.

Le paramètre caché

Tout cela semble bien beau et logique. Pourtant, il existe un paramètre invisible qui détermine tout.

Comment un candidat se fait-il connaître ? Par les médias, évidemment. Ainsi, un candidat totalement inconnu qui se présente comme une fleur a-t-il une chance d’obtenir ces parrainages ? Étudions le nombre de parrainages en fonction du temps d’antenne dans la période de récolte des signatures :

Nombre de parrainages en fonction du temps de parole du candidat et de ses soutiens (échelles logarithmiques, temps en secondes). En-dessous de 3h d’exposition dans les médias, les candidats n’ont aucune chance d’obtenir les 500 parrainages nécessaires.
Sources : Arcom et Conseil Constitutionnel

Le constat est très clair : le nombre de parrainages est proportionnel au temps d’exposition du candidat et de ses soutiens.

Ce n’est pas une règle absolue, car on voit qu’il y a une zone d’indécision entre 10.000 secondes (environ 3 heures) et 100.000 secondes (30 heures) où certains candidats peuvent tirer leur épingle du jeu. Cela peut être dû à leur ancienneté en politique, à un programme axé sur un sujet absent chez les autres candidats, ou bien à leur réelle popularité. D’autres s’en sortent moins bien dans cette zone.

En-dessous de 3 heures, il est clairement impossible d’obtenir les 500 parrainages nécessaires. Et au-delà de 30 heures, les 500 parrainages sont garantis. Bien sûr, cela peut rester tendu pour certains candidats, en particulier aux extrêmes, à cause de la publication des parrainages.

Une mesure farfelue qui en cache une autre

Ainsi, cette histoire de signatures est totalement grotesque. Et surtout, extrêmement hypocrite. Pour être transparent, il suffirait de mettre le critère suivant : obtenir 30h d’exposition dans les médias en janvier et février. Ce serait peut-être choquant pour le public, mais cela refléterait beaucoup plus la réalité.

Du coup, le constat est un peu effrayant. Dans notre « démocratie », ne peuvent se présenter à la Présidence de la République que les candidats ayant le soutien des milliardaires qui possèdent les médias. Ceux-ci font donc une présélection, sans que jamais cette règle ne soit écrite.

Par ailleurs, une partie des médias sont possédés par l’État. On pourrait se dire que eux, au moins, donneraient une audience aux « sans voix ». Il faut pourtant se rendre à l’évidence, les médias d’état filtrent tout autant. À croire que les donneurs d’ordre sont finalement exactement de la même caste dans le public et dans le privé.

Du coup, le CSA peut s’amuser à jouer au gendarme jusqu’à l’élection présidentielle. C’est totalement inutile, dans la mesure où les seuls candidats retenus à ce stade sont déjà ceux qui ont les faveurs des médias. Il est déjà trop tard, toutes les voix dissidentes ont déjà été éliminées.

Le piège du premier tour

L’élection présidentielle se joue actuellement à deux tours. Au premier tour, chaque votant choisit un candidat et un seul. Il y a un choix assez large dans le spectre politique. Pourtant, certains candidats se ressemblent fortement.

Des galaxies…

En 2022, je crois que nous n’avons jamais eu autant de clones qui se présentent. Certains thèmes sont décidément sur-représentés par les candidats qui ont tiré leur épingle du jeu.

Les galaxies :

  • Macron et son clone féminin Pécresse dont la médiocrité criante porterait presque à sourire si elle n’était pas celle ayant bénéficié de la plus grande exposition médiatique jusqu’à présent,
  • Le Pen et son clone Zemmour, ainsi que Dupont-Aignan dans une ligne légèrement moins dure,
  • Mélenchon et les communistes à sa suite (Arthaud, Poutou, Roussel),
  • Hidalgo et son ombre Jadot sur un fond de toile vert et bordeaux,
  • le seul rescapé de la purge médiatique, Lassalle…

Au passage, les médias continuent impunément leur sélection arbitraire, en n’invitant pas par exemple Jean Lassalle dans la plupart des émissions. « Ah, mais de toute façon c’est un clown qui fera à peine 1 % ». Petite question : est-ce qu’il fait 1 % parce qu’il n’est pas présenté dans les médias, ou bien est-ce qu’il n’est pas présenté dans les médias parce qu’il est annoncé dans les sondages à 1 % ? Une histoire de poule et d’œuf…

… et du vide

À l’inverse, certains pans majeurs des préoccupations des Français ne sont pas du tout représentés.

Les sujets favoris des Français…

Une étude de France Bleu s’est intéressée aux propositions citoyennes des Français et en a tiré les principales préoccupations. En toute première position vient la « démocratie », ce qui inclut la transparence de la vie publique, mais aussi la relocalisation de nos industries et la souveraineté de la France.

Source : étude de France Bleu
… sont écartées

Or, la plupart de ces préoccupations sont maintenant absentes des propositions des candidats qui ont été présélectionnés par les médias.

Le vide :

  • les questions de transparence des élus, restaurer la confiance dans la politique, tout cela est totalement absent des débats, même Macron, qui avait hypocritement axé sa campagne de 2017 sur le sujet, n’en parle plus,
  • le RIC, avec Clara Egger largement sous-exposée dans les médias, alors que le RIC est plébiscité par une très large majorité de Français, souvent à plus de 70 %, cela été montré par tous les sondages sur le sujet… et la seule candidate portant le projet a bénéficié de 20 minutes d’antenne en tout et pour tout en janvier et février, évidemment très loin des 3 heures fatidiques…
  • la santé, le système de soins et les infrastructures publiques sont totalement absents des débats,
  • l’écologie, dont on ne peut pas vraiment dire qu’elle soit représentée par des candidats pastiches comme Hidalgo ou Jadot… l’écologie devrait d’ailleurs être au cœur des programmes de tous les candidats, mais c’est une autre affaire,
  • la souveraineté nationale avec Asselineau, le seul à avoir une ligne claire sur la sortie de l’UE et de l’OTAN, accompagné d’analyses géopolitiques très justes… Lassalle ne fait clairement pas le poids dans le domaine, Dupont-Aignan en parle mais n’est pas aussi précis – on peut douter qu’il sortirait réellement de l’UE – et il n’est de toute façon jamais présent dans les médias,
  • les gilets jaunes, qui avaient pourtant plusieurs candidats et qui représentent une portion importante de la population,
  • les restrictions de libertés ont fait couler beaucoup d’encre lors de la crise de la covid, mais on n’en entend plus beaucoup parler à moins de 2 mois de l’élection…
L’omerta

Évidemment, d’autres sujets capitaux dont peu de gens se soucient et qui n’apparaissent jamais dans les médias font l’objet d’une censure absolue.

Par exemple, le silence est assourdissant sur les réseaux pédocriminels, qui impliquent très vraisemblablement de hauts responsables politiques. Et ce, malgré de nombreuses tentatives de Karl Zéro pour remettre le sujet sur la table. Comme pour les autres, il suffit qu’il ne passe pas dans les grands médias pour le faire taire. Aucunement besoin de poison…

Évidemment, personne ne parle jamais de création monétaire. C’est pourtant le sujet le plus essentiel. En effet, c’est elle qui permet de financer les projets présentés par les candidats. Un projet sans réfléchir à son financement est par avance mort-né. Pourtant, absolument personne ne remet en cause la création monétaire par les banques privées. Ainsi, tout le monde est de facto d’accord pour que ce soit les banques qui décident des projets qui verront réellement le jour. Et ce, quel que soit le candidat qui gagnera l’élection.

Les sujets phares

Les médias ne se contentent pas de mettre en avant des candidats. Ils ont également une influence déterminante dans le façonnement de l’opinion publique en général. En mettant en avant certains sujets plutôt que d’autres, ils tournent les têtes vers tel ou tel sujet. Et bien sûr, ils vont tourner les têtes vers les sujets qui les arrangent.

En période électorale, c’est d’autant plus crucial que chaque candidat a un certain nombre de sujets de prédilection. Ainsi, multiplier les reportages sur l’insécurité, par exemple, fait mécaniquement le jeu de l’extrême droite, sans jamais mentionner leurs candidats. Cela n’est évidemment pas pris en compte par l’Arcom (ex-CSA).

Parler d’un sujet n’est d’ailleurs pas suffisant. La manière dont le sujet est traité est également primordiale. Par exemple, cet article de l’Express – propriété de Patrick Drahi… – sur le RIC qui traite le sujet de manière plutôt… orientée. C’est le moins qu’on puisse dire. Évidemment, nos chers milliardaires seraient un peu embarrassés si le peuple pouvait obtenir un peu plus de pouvoir.

Non, les médias ne doivent surtout pas parler des sujets qui rassemblent. Au contraire, ils doivent absolument diviser, se faire caisses de résonances des fractures sociales, monter les gens les uns contre les autres. C’est là tout le pouvoir de l’élection de « partis ».

Préparer l’opinion

Les prophéties

Les gens de pouvoir aiment les prophéties. En 2014, Jacques Attali indiquait nonchalamment que Macron, « un garçon très brillant », était un bon élève « présidentiable ». Ce à quoi il a rajouté en riant : « J’irais même plus loin. Je crois que je connais celle qui viendra après lui ».

Or, il se trouve que Valérie Pécresse est passée comme Macron par le cursus des « Young Leaders », ces « talents présidentiables » recrutés par les élites. Et elle est celle qui a effectivement la plus grande exposition médiatique depuis janvier lorsqu’on compte également ses soutiens… On voit une sorte de trame bien ficelée se dérouler sous nos yeux.

Les sondages

Les sondages d’opinion, pour l’essentiel eux-aussi financés par exactement les mêmes qui possèdent les médias, sont un autre instrument, une autre maille du filet présidentiel. En effet, s’ils sont censés recueillir l’opinion du moment, ils forgent également l’opinion future. Ils sont consultés par une large portion de la population, et permettent aux hésitants de faire un choix final. Or, dans la présidentielle, il suffit de quelques petits pourcents, quelques centaines de milliers de votes, pour tout faire basculer.

Bien sûr, lorsqu’Attali lâche une bombe en direct en indiquant les futurs présidents, il fait une prophétie. Mais les sondages, en manipulant l’opinion, vont plus loin puisqu’ils influencent à grande échelle le cours de l’histoire. Ils font des prophéties auto-réalisatrices.

Le « vote utile »

Les sondages sont particulièrement influents lors du premier tour de l’élection présidentielle. En effet, chaque votant ne peut choisir qu’un seul candidat. Peu importe ses préférences pour les autres candidats, il n’a droit qu’à un seul. Ainsi, un votant « de droite » a le choix entre Macron et Pécresse. Am-stram-gram. De même, le votant « de gauche » a un peu l’embarras du choix cette année.

Bien évidemment, les inconditionnels de tel ou tel candidat ne vont probablement pas changer d’avis à cause d’un sondage. Seuls les indécis sont malléables. Mais dans le cas d’un duel équilibré, ce sont bien ces derniers qui ont le dernier mot.

Au premier tour, les électeurs sont priés de ne pas « gaspiller » leur vote pour un candidat « qui n’a aucune chance ». Ainsi, plutôt que de voter en fonction de leurs opinions, ils vont voter pour un candidat « qui leur déplaît le moins » parce qu’il a plus de chances de l’emporter… selon les sondages. Curieuse manière de choisir un président !

Le piège du deuxième tour

Une fois le premier tour terminé, il ne reste que deux candidats en lice. Inutile de dire que, pour la majorité des Français, il s’agira d’une déception. En effet, ces deux candidats réunissent généralement à eux deux environ 40 % des suffrages au premier tour, même pas la majorité. 60 % des Français sont des laissés-pour-compte.

La confusion

Cette fois, ce système provoque une confusion tant au sein des partis qui n’ont pas gagné que dans la tête des électeurs. Eh oui, les chefs des différents partis perdants donnent alors des « conseils de vote » à leurs troupes. Généralement, ils se prennent des volées de bois vert quel que soit leur choix. Au pire, ils courent à droite et à gauche, faisant des alliances sans queue ni tête, avec l’espoir de se faire des amis dans le camp gagnant pour les 5 années à venir. Et ils n’ont qu’une seule semaine pour sceller ces alliances, autant dire qu’on assiste à un bal des plus comiques.

Certains se compromettent pour longtemps en faisant alliance avec des candidats sans en mesurer les conséquences. Nicolas Dupont-Aignan s’est ainsi « grillé », pour ainsi dire, en négociant un futur poste de ministre avec Marine Le Pen lors des élections de 2017. Beaucoup l’ont abandonné alors – et s’en rappellent encore aujourd’hui.

Pour les électeurs, la situation n’est pas bien meilleure. Malgré tout, généralement il y a un candidat « de droite » et un « de gauche », et la France coupée en deux se rabat vers celui vers lequel elle penche le plus. Mais toujours en faisant des compromis scabreux, pour ne pas dire des compromissions. Dans tous les cas, beaucoup vont au bureau de vote à reculons.

Voter « contre »

Et puis, il y a les cas un peu particuliers comme en 2017, avec Emmanuel Macron d’un côté et Marine Le Pen de l’autre. Exactement la même situation qu’en 2002 avec le duel Chirac – Le Pen. Tout le monde crie alors au « barrage contre le fascisme ». Il semblerait en l’occurrence qu’en 2017, il n’y avait pas tant de différences que ça entre les deux candidats.

Pour rappel, Macron a quelques casseroles avec des remarques racistes que même la « fasciste » de service n’aurait probablement pas osé proférer en public. Par ailleurs, il ne s’est pas privé de jouer à l’autocrate en matant toute révolte plutôt que de négocier avec le peuple. Non, je n’appelle pas à voter Marine ! Je fais simplement un constat des faits. Un fascisme peut en cacher un autre.

Dans tous les cas, cette situation amène une grande majorité à « voter contre » le candidat « à bloquer », plutôt que « pour » la personne qui va prendre toutes les décisions à votre place pour votre pays pendant les cinq prochaines années. Alors, un communiste va préférer voter à droite que de laisser passer le fascisme. Bravo la démocratie ! De qui se moque-t-on ?

Il serait amusant d’assister à un duel Le Pen – Zemmour au deuxième tour cette année, cela pourrait être sacrément comique ! Le pire étant que c’est parfaitement possible statistiquement.

Les contrôles des votes

Dans beaucoup de pays, on peut douter de l’exactitude des résultats. En effet, il est possible de tricher sur le nombre de votes pour tel ou tel candidat à beaucoup de niveaux.

Le bureau de vote

En France, la partie la plus proche des citoyens, le bureau de vote, est très contrôlé. En particulier, ceux qui dépouillent sont de partis différents et se surveillent mutuellement. C’est une fierté française, car cela limite l’un des modes de fraude électorale les plus simples : le « bourrage » d’urnes. En effet, lorsque de multiples yeux sont braqués en permanence vers l’urne et les petites enveloppes, difficile d’en substituer une large portion par de faux votes.

Un autre élément essentiel est l’isoloir, qui permet d’enlever toute pression des pairs au moment du vote.

En France, on estime généralement qu’il est difficile de tricher, tout simplement parce que la partie la plus visible, le bureau de vote, est jugé « très sûr ». Mais on oublie trop souvent que le bureau de vote n’est qu’un petit maillon de la chaîne électorale.

Préparer l’opinion

Or, la fraude ne commence pas du tout avec le vote lui-même. Elle peut être préparée par de multiples moyens bien avant.

On a déjà vu que la propagande médiatique et les sondages sont des instruments essentiels de fraude forge de l’opinion. Avec les nouvelles technologies, d’autres outils émergent pour manipuler encore davantage le public.

Des entreprises comme Facebook ou Google ont un poids grandissant dans la fabrique des avis populaires. Un lanceur d’alertes a par exemple prévenu que Google changeait les résultats de recherche pour manipuler l’élection aux États-Unis. De la même manière, Facebook peut parfaitement favoriser certains contenus pour soutenir tel ou tel candidat.

D’autre part, les réseaux sociaux sont devenus un outil formidable pour récolter des informations sur les électeurs. Facebook affirme qu’il suffit à un utilisateur de laisser plus de 70 « likes » pour le connaître mieux que ses amis. Avec 300 « likes » ou plus, Facebook le connaît encore mieux que son conjoint, voire mieux qu’il ne se connaît lui-même !

On sait alors quels quartiers d’une ville seront plus susceptibles de changer d’opinion lors d’une campagne de porte-à-porte, ou encore d’appels téléphoniques. Emmanuel Macron a fait appel pour sa campagne de 2017 à un cabinet spécialisé dans le domaine : SelfContact.

Faux électeurs, procurations…

En plus des techniques de manipulation de l’opinion, la triche reste parfaitement possible, en particulier en amont de la chaîne. Cela peut se faire en ajoutant de faux électeurs à la liste électorale comme les morts ou même des personnes imaginaires, utiliser des procurations pour faire voter des non votants, etc. On peut même acheter des votes auprès de populations peu regardantes sur l’éthique et en manque de monnaie…

En 2017, beaucoup d’électeurs se sont vus radiés des listes sans aucune notification préalable. On parle là de dizaines de milliers d’électeurs. Des mauvaises langues murmurent qu’il s’agissait d’une purge pour diminuer les chiffres de l’abstention. Par ailleurs, certains électeurs ont parfois la possibilité de voter deux fois… on parle d’environ 500.000 doublons en 2017.

Les référendums

Le référendum, où il ne s’agit pas de voter pour une personne, mais pour un sujet, est un peu à part. En effet, la question posée lors d’un référendum est particulièrement importante car elle peut induire psychologiquement les indécis à pencher d’un côté ou de l’autre de la balance.

Un contre-exemple flagrant est le vote de ralliement de l’Autriche au Troisième Reich en 1938 :

Alors, 𝕵𝖆 ou 𝔑𝔢𝔦𝔫 – avec le pistolet sur la tempe -, mon cœur balance. Sans surprise, le résultat a été 99 % de « oui ».

Mais il y a plus subtil. Par exemple, lors du référendum sur le Brexit au Royaume Uni, une commission a écrit un document de 53 pages pour expliquer qu’il fallait changer la question envisagée. La question d’origine était :

Le Royaume Uni doit-il rester membre de l’Union Européenne ?

Après modification, la question a été changée en :

Le Royaume Uni doit-il rester membre de l’Union Européenne, ou bien quitter l’Union Européenne ?

Au passage, même la deuxième formulation n’est pas totalement neutre à cause du placement des deux possibilités. Qui sait, lorsque le score est extrêmement serré dans l’opinion entre les deux options, l’ordre peut avoir un effet décisif.

On pourrait parfaitement imaginer imprimer la moitié des bulletins avec une formulation et l’autre avec la formulation inversée… mais cela poserait des problèmes d’erreurs au dépouillement.

Les médias et les questions

Pourquoi mentionner les questions lors des référendums alors que cet article parle de l’élection présidentielle ? Tout simplement parce que, lors de leurs passages dans les médias, les candidats sont soumis à des questions de la part des animateurs et journalistes.

Évidemment, certaines techniques simples peuvent décrédibiliser un candidat. Par exemple, lui poser des questions totalement à côté de ses sujets favoris ou du fer de lance de sa campagne. Orienter les questions de manière à ce que ses réponses attendues paraissent loufoque. Ne pas lui laisser le temps d’expliquer pourquoi ses réponses diffèrent de ce que l’on attendait. Tout l’arsenal de manipulation est à disposition. À lire impérativement sur le sujet « L’art d’avoir toujours raison » de Schopenhauer.

L’après…

Autant le bureau de vote en France est extrêmement contrôlé, autant la suite de la chaîne est assez opaque. Il n’y a en tout cas quasiment jamais de communication dessus. C’est « de la technique », qu’on laisse aux experts. Tout cela est ensuite publié en accès libre sur le portail gouvernemental

Chacun est invité par exemple à vérifier que les résultats présentés en préfecture, qui sont des agrégés des résultats des différents bureaux de votes, correspondent bien à ce qui est attendu. Mais qui le fait vraiment ? Des anomalies sont souvent relevées par des voix, mais ces voix ne portent jamais. Là encore, pas besoin d’une balle dans la tête.

Les moyens alternatifs

Les choses se compliquent encore davantage lorsqu’on autorise le vote à distance par courrier. Hors des clous des bureaux de vote hyper contrôlés, la fraude peut exploser tranquillement.

Quant au vote électronique, à moins d’avoir un système dont le code source est publié et vérifiable, il y a toujours des tas de moyens de tricher. Les États-Unis sont devenus assez connus pour le flou entourant le vote électronique, avec des soupçons de fraude massive quasiment à chaque élection.

Conclusion sur le système actuel

Ce sont les médias qui sélectionnent les candidats finalistes lors de la campagne. En fonction de leur popularité auprès des différents médias, chaque candidat est également passé par un filtre plus ou moins positif et avec une exposition différente. Nos « élus » sont donc choisis, sélectionnés, filtrés, et finalement élus, par 10 milliardaires.

Les instances censées veiller à l’égalité des temps de parole dans les médias, les seules à pouvoir éventuellement rétablir l’équilibre, ne sont que des coquilles vides. Plus exactement, elles sont des hochets que les « démocrates » peuvent brandir à tout moment pour indiquer que tout va pour le mieux.

Clara Egger représente un projet plébiscité par plus de 70 % des Français, le Référendum d’Initiative Citoyenne. On peut difficilement en dire autant de toutes les autres mesures portées par les candidats en lice. Mais le RIC signifierait une perte énorme de pouvoir pour les oligarques français. Il serait totalement inadmissible pour ces derniers que le RIC entre dans les débats lors de la campagne présidentielle. Ainsi, il est très facile pour eux d’éliminer de telles voix dangereuses dès le départ.

Mais cela ne s’arrête pas là. Une fois élu, le peuple n’a absolument aucun moyen de lutter contre les décisions prises par cette personne qui ne représente qu’une petite fraction de la population.

Le peuple n’a aucun pouvoir

Rectifions. Les élus « représentent » le peuple sur le papier, mais dans la réalité, le Président prend des décisions qui l’arrangent… ou qui arrangent ses amis. Il prend toute action qui bénéficie au cercle de ceux qui l’ont élu. Car il sait parfaitement que ce n’est pas le peuple qui l’a choisi. Ce sont les médias. Et il sait qu’il en sera de même aux prochaines élections.

Emmanuel Macron, avec moins de 30 % d’approbation dans la population au cœur de son mandat, de l’aveu même des sondages payés par ses propres amis, ose même se représenter à l’élection, avec une exposition médiatique conséquente. Où est la représentativité ? En réalité il a été élu au premier tour en 2017 avec 28 % des voix. Et forcément pas beaucoup plus au deuxième tour en réalité. Non seulement il n’est pas représentatif des Français, mais il ne représente même pas un tiers d’entre eux.

Le peuple n’a qu’à se taire. Ah, évidemment, il peut parler. Le bla-bla n’est jamais vraiment dangereux s’il n’est pas accompagné d’actes concrets. Et si les plus exaspérés daignent montrer un peu les crocs, les milices armées du Gouvernement leur règlent violemment leur compte. Comme disait Guillemin : « Silence aux pauvres ! À la niche, une bonne fois, les gens de rien !»

Les alternatives

Critiquer sans proposer de solution est rarement constructif.

La critique est toutefois nécessaire pour que nous ayons conscience de la réalité. Pourquoi donc chercher des alternatives à ce qui serait déjà parfait ? Comprendre les limites et les failles de l’existant est d’autant plus important que cela évite de reproduire nos erreurs.

Dans le cas particulier de l’élection présidentielle, il y a tellement de facteurs à revoir que la tâche semble bien ardue. Voyons quelques améliorations que l’on pourrait envisager. Il y en a d’autres, mais j’ai retenu ici les principales, par ordre croissant d’impact.

Prendre en compte les votes blancs

Avec le système actuel, les votes blancs, ainsi que l’abstention, ne comptent pas pour obtenir la « majorité absolue ». Ainsi, en théorie, si seulement un seul Français se rendait aux urnes le jour de l’élection et votait pour le candidat X, le soir même tous les médias reprendraient en chœur que le candidat X a été élu avec 100 % des voix. C’est totalement absurde !

L’abstention est comptabilisée, mais est totalement ignorée ensuite par les médias lors de l’annonce des résultats. Dans tous les cas, elle ne change strictement rien concrètement. Il en va de même aujourd’hui pour les votes blanc. Ils sont comptabilisés, mais ils n’interviennent pas pour calculer la majorité.

Il faudrait impérativement, en considérant que l’on garde le système actuel, avoir un quorum sur l’élection, en prenant en compte les votes blancs. Et de mon point de vue, l’abstention également. Dans le cas où la majorité absolue ne serait pas atteinte, il faudrait refaire une élection complète en repartant à zéro. Et évidemment, aucun candidat s’étant présenté au premier passage n’aurait le droit de se représenter. Eh oui, tous ces candidats ont en réalité été rejetés par les électeurs, qui n’ont pas voulu d’eux. Cela changerait totalement la donne. Il faudrait d’ailleurs faire de même lors des autres élections.

Un changement mineur…

Prendre en compte les votes blancs avec un quorum serait totalement insuffisant pour rendre réellement le pouvoir au peuple. Malgré tout, un changement en apparence aussi mineur aurait un impact significatif sur tout le processus de l’élection. En effet, imaginons un instant qu’en 2017 il ait été appliqué.

Voici le résultat du vote au deuxième tour tel qu’il nous a été présenté dans tous les médias :

Résultat du 2ème tour de l’élection présidentielle de 2017, sans tenir compte de l’abstention ni des votes blancs et nuls.
… aux conséquences majeures

Mais le tableau est totalement différent lorsqu’on considère l’abstention ainsi que les votes blancs et nuls :

Résultat du deuxième tour de l’élection présidentielle de 2017 en prenant en compte l’abstention ainsi que les bulletins blancs et nuls.

En réalité, Emmanuel Macron n’a pas du tout obtenu la majorité des votes de l’ensemble du corps électoral. Bien sûr, on peut arguer que les abstentionnistes n’avaient qu’à aller voter. Imaginons un instant que le vote blanc soit en réalité comptabilisé dans les résultats finaux. Imaginons également que les abstentionnistes aient tous voté blanc, ce qui ne serait pas si farfelu. L’élection aurait été invalidée car aucun des deux candidats n’auraient atteint les 50 % nécessaires.

Poussons le raisonnement plus loin. En effet, la grande majorité de ceux qui ont voté pour Emmanuel Macron n’ont en réalité pas voté « pour » lui, mais « contre » Marine Le Pen. Mais si les votes blancs comptaient réellement, la logique de ces électeurs auraient été différente. Plutôt que de voter « contre », ils auraient voté blanc, s’assurant de toute façon que Marine Le Pen n’aurait pas obtenu non plus les 50 % nécessaires.

Ce simple changement aurait pu invalider l’élection. Et s’il avait fallu tout recommencer, cette fois avec des candidats différents ?

Appliquer la parité des temps de parole

Il ne s’agit pas ici de présenter une idée totalement folle, une nouveauté disruptive, une mesure scandaleuse. Mais seulement de respecter réellement ce qui nous est présenté comme ce qui existe déjà.

Bien évidemment, les temps de parole devraient être respectés à stricte égalité de temps. La règle actuelle qui est censée se baser sur le « poids » d’un candidat est biaisée et inapplicable, surtout pour les candidats qui n’ont jamais été présents. Non, il faut laisser la parole à chacun, à égalité. Les gens, et les maires en tout premier lieu, se rendront vite compte des candidats loufoques.

Il y a fort à gager que si Clara Egger avait eu le même temps de parole qu’Éric Zemmour, elle avait toutes ses chances d’obtenir ses parrainages. Les maires ont tout à gagner avec le RIC, car les citoyens sont généralement plus proches de leur maire que du Président de la République. Ils exigeraient plus de pouvoir pour les maires, se battraient pour les zones rurales oubliées, demanderaient des lois et des mesures pour relocaliser et redonner des moyens aux communes. Il me semble qu’il s’agit là d’évidences.

Changer le mode de scrutin

Une autre mesure simple pourrait être mise en place, qui permettrait d’être beaucoup plus « juste » : se débarrasser du système de majorité absolue à deux tours. En effet, le système à deux tours provoque comme on l’a vu des attitudes totalement contre-productives, tant au niveau des électeurs que des partis : vote utile, alliances contre nature, vote de barrage, etc.

Il existe une alternative simple, qui respecte les choix de chacun : le jugement majoritaire. Pour comprendre de quoi il s’agit, cette vidéo l’explique en 3 minutes :

Pour ceux qui veulent aller plus loin, je ne peux que conseiller cette vidéo :

Ce serait un changement assez simple à mettre en œuvre, finalement. Par ailleurs, il n’y aurait pas deux tours à faire ce qui simplifierait les choses pour tout le monde.

Il y a également d’autres systèmes, comme le scrutin de Condorcet randomisé. Le jugement majoritaire a l’avantage d’être extrêmement simple à comprendre, et résout déjà les principaux problèmes du système actuel. Alors, qu’est-ce qu’on attend ?

Le RIC

Le RIC permet d’introduire le ver dans la pomme, sans pour autant changer toute la pomme. Avec un RIC en toutes matières, il devient possible de :

  • proposer des nouvelles lois en faveur de la population et plus seulement des élites,
  • supprimer ou modifier des lois qui vont à l’encontre des intérêts du peuple,
  • modifier la Constitution pour rendre petit-à-petit, article après article, le pouvoir au peuple dans tous les pans de l’exercice du pouvoir,
  • révoquer un élu qui aurait trahi le peuple,
  • contrôler les médias et l’information en général, au lieu de laisser une poignée d’oligarques nous dicter leurs volontés,
  • etc.

À terme, le RIC permettrait de totalement réformer les institutions, car il serait facile pour le peuple de faire voter des lois ou des changements dans la Constitution qui éroderait progressivement le pouvoir tout-puissant des élus. Supprimer les pantouflages. Enfin lutter contre l’évasion fiscale. Relocaliser nos industries. Et surtout, augmenter le contrôle citoyen contre la corruption et les abus des élus.

Conclusion

Loin d’être une démocratie, la France est une oligarchie.

L’élection présidentielle est tout sauf démocratique. Elle est manipulable à souhait par les puissants. Dans les faits, ce sont les quelques oligarques possédant les médias qui élisent le nouveau président, trié sur le volet parmi un panel de « présidentiables acceptables ». De fait, le nouvel élu n’a aucune marge de manœuvre : il doit suivre les lignes directrices de ses bienfaiteurs.

Pire encore, une fois élu, le Président a les pleins pouvoirs pendant 5 ans. Quelles que soient ses décisions, le peuple est totalement impuissant. Au cas où il se soulèverait, la seule réponse est la répression violente.

Il existe pourtant des solutions simples pour rendre tout cela un peu plus « démocratique ». Si le peuple avait ne serait-ce même qu’un tout petit peu de pouvoir, le RIC, plébiscité par une très large majorité de Français, aurait été mis en place il y a belle lurette. Preuve s’il en fallait encore une que nous ne sommes pas du tout en démocratie.

Post-scriptum

Ce texte clairement à charge contre l’élection présidentielle n’est pas une invitation à l’abstention ou au vote blanc. Je ne fais que présenter l’état des choses. À chacun ensuite de décider pour lui-même les conclusions qu’il doit en tirer.

Le scandale des temps de parole

L’Arcom, anciennement CSA, est en charge de surveiller les temps de parole des candidats dans les médias avant une élection.

Mais… pourquoi donc surveiller les temps de parole ? Après tout, c’est à chaque citoyen de voter en son âme et conscience pour le candidat qui lui plaît le plus.

Non ?

Les temps de parole décident du candidat élu

L’excellent blog « Notre Époque » a fait un excellent travail de recherches (y compris bibliographique) sur le sujet. Malheureusement, ce blog a disparu. J’ai donc reproduit les articles de l’époque sur mon propre blog à des fins d’archives :

Les conclusions sont sans appel : le pourcentage de temps de parole dans les médias permet d’avoir un pourcentage de votes équivalent lors de l’élection. C’est une relation directe, immuable, mathématique.

Ni plus, ni moins.

Il y a des études éparpillées à l’étranger, car c’est un sujet assez peu étudié, qui arrivent aux mêmes conclusions. Certaines vont même d’ailleurs plus loin : le contenu positif ou négatif pour un candidat n’a que peu d’importance. C’est principalement le temps d’exposition dans les médias qui est décisif. Peu importe qu’on dise du mal ou du bien de ce candidat, c’est le fait d’en parler qui est crucial.

Ce n’est pas pour rien…

… que le CSA est censé veiller.

L’un des rôles de cet organisme est de veiller à « la pluralité » en terme de temps de parole politique en période électorale. S’il était démontré qu’il n’y a aucun lien entre temps de parole et résultats des votes, il y a fort à parier que ce rôle n’existerait tout simplement pas.

Ainsi donc, le CSA veille.

Mais comme tant de ces « API » (Autorité Publique Indépendante) et autres « Hautes Autorités » aux rôles pourtant cruciaux pour le bon fonctionnement de la République, cet organisme n’a aucun pouvoir.

Il peut s’époumoner autant qu’il veut, publier les chiffres qu’il veut. Aucun problème. Parfois, il va même jusqu’à émettre des « mises en garde ».

Il est purement et simplement ignoré.

Il n’est qu’une entité fantôme qui ne sert qu’à agiter l’épouvantail : « Pas d’inquiétude de ce côté-là, on a le CSA qui veille ».

Une loi infâme pour éliminer les petits

En avril 2016 est votée une loi scandaleuse sur les temps de parole. Adieu l’égalité absolue ! Les temps de parole seront maintenant proportionnels à la « représentativité » des candidats. Cette loi aux définitions floues et subjectives est un nouveau clou enfoncé dans le dos des « petits candidats ». Ils sont petits, qu’ils le restent !

On peut effectivement se dire que, si un clown se présente comme candidat, il paraît logique de ne pas trop lui donner la parole pour éviter aux gens de perdre leur temps. Le problème de la loi en question est : qui décide ? Les « petits candidats » n’ont-ils réellement tous « rien à dire » ? Qui juge qu’ils sont « petits » ?

Quelques précisions

La loi précise trois manières de « calibrer » l’importance des candidats :

  • en fonction des résultats obtenus aux plus récentes élections par les candidats ou par les partis et groupements politiques qui les soutiennent,
  • en fonction des sondages d’opinion,
  • la contribution de chaque candidat à l’animation du débat électoral.

Le premier point est totalement hors sol. C’est un peu comme si les opinions des peuples ne changeaient jamais, comme si l’environnement ne se transformait pas, comme si aussi les formations politiques ne variaient jamais leurs discours. Comme si la politique était quelque chose de statique. Quel intérêt à élire de nouvelles têtes, dans ce cas ? La loi est clairement faite pour que rien ne change.

Quant au deuxième point, les « sondages d’opinion » sont financés par les mêmes qui financent les médias. Ils ont donc exactement les mêmes conflits d’intérêts et mettent donc en avant exactement les mêmes candidats. Qui contrôle le bon fonctionnement de ces sondages ? Ah oui, une autre coquille vide, la « commission des sondages ».

Heureusement que le ridicule ne tue pas, car le dernier point est évidemment une mesure qui se mort la queue. Un candidat ne peut contribuer au débat que si on le laisse parler en premier lieu…

Le test du terrain

Prenons un exemple précis pour juger de la pertinence de cette loi.

Le candidat ayant le plus de temps de parole cumulé en janvier 2022 est de très loin… Éric Zemmour.

Or, il n’a jamais été candidat, n’est pas dans un parti. Par ailleurs, il est crédité tout au plus de 15 % des votes.

À l’autre extrémité du spectre, tout en bas du graphique, une candidate, Clara Egger, a eu droit à 0 secondes de temps de parole dans les principaux médias. Pourtant, le programme de cette candidate est axé sur une mesure soutenue par une grande majorité de Français. En effet, elle soutient le RIC. Un sondage Ifop montre que 73 % des Français y sont favorables.

On a donc d’un côté un candidat qui se répète en boucle sur tous les plateaux télé alors qu’il attire moins d’un Français sur 5, et de l’autre côté une candidate soutenant une mesure plébiscitée par les 3/4 des Français qui n’a pas eu le droit à une seule seconde de temps de parole.

Un véritable scandale…

Loin du discours officiel et lissé, les temps de parole sont donc choisis par les médias. Évidemment, les discours les plus clivants sont retenus en priorité, tandis que les idées qui pourraient rassembler le peuple sont recalées.

Cela a un impact majeur sur le fonctionnement de la République et de la représentativité des élus. En effet, comme l’indique très justement le blog que j’ai reproduit plus haut, la conclusion qui en découle est que :

Le candidat vainqueur de l’élection n’est pas le candidat privilégié des Français, mais celui des médias.

Ainsi, les quelques milliardaires qui se partagent le contrôle des médias sont en réalité ceux qui élisent le futur candidat. Pas vous, cher lecteur, navré de vous délivrer peut-être un petit électro-choc.

Dans mon roman « Le Président Providentiel », c’est un candidat totalement inconnu du peuple qui se présente. Plébiscité par les médias, le résultat n’est pas surprenant.

Un petit outil à disposition

Les fichiers du CSA étant assez indigestes pour le citoyen lambda, je mets à disposition un petit outil pour visualiser les temps de parole des candidats. Il s’agit de graphes qui permettent de voir d’un seul coup d’œil le gouffre qui sépare les « baleines » des « sauterelles », pour reprendre l’analogie du blog « Notre Époque ».

Pour y accéder, cliquer sur l’image ci-dessous :

On va me dire qu’il y a bien parité pour les 4 ou 5 premiers candidats. Mais il faut se rendre à l’évidence, tous sont extrêmement clivants. Par ailleurs, ils se ressemblent tous sur les sujets les plus essentiels :

  • création monétaire,
  • évasion fiscale,
  • répartition des richesses,
  • corruption,
  • souveraineté nationale,
  • impuissance du peuple.

Où sont les rares candidats qui pourraient changer quelque chose à ces points essentiels ? Ils obtiennent littéralement mille fois moins de temps de parole que les autres. Autant dire que, pour qu’ils soient élus, il faudrait un miracle, une licorne statistique, de ce genre :

Visualisé ainsi, c’est déjà beaucoup plus clair.

Conclusion

La fameuse « parité des temps de parole » est une vaste farce. Il n’y a strictement aucune parité, tout le temps de parole est donné aux futurs vainqueurs élus par les médias.

Où sont donc les « autorités » censées s’assurer du « bon fonctionnement » de la République ? Mais que fait la police ? Comment croire encore à la « démocratie » pourtant dans toutes les bouches ?