Le scandale des temps de parole

L’Arcom, anciennement CSA, est en charge de surveiller les temps de parole des candidats dans les mĂ©dias avant une Ă©lection.

Mais
 pourquoi donc surveiller les temps de parole ? AprĂšs tout, c’est Ă  chaque citoyen de voter en son Ăąme et conscience pour le candidat qui lui plaĂźt le plus.

Non ?

Les temps de parole décident du candidat élu

L’excellent blog « Notre Époque » a fait un excellent travail de recherches (y compris bibliographique) sur le sujet. Malheureusement, ce blog a disparu. J’ai donc reproduit les articles de l’Ă©poque sur mon propre blog Ă  des fins d’archives :

Les conclusions sont sans appel : le pourcentage de temps de parole dans les mĂ©dias permet d’avoir un pourcentage de votes Ă©quivalent lors de l’Ă©lection. C’est une relation directe, immuable, mathĂ©matique.

Ni plus, ni moins.

Il y a des Ă©tudes Ă©parpillĂ©es Ă  l’Ă©tranger, car c’est un sujet assez peu Ă©tudiĂ©, qui arrivent aux mĂȘmes conclusions. Certaines vont mĂȘme d’ailleurs plus loin : le contenu positif ou nĂ©gatif pour un candidat n’a que peu d’importance. C’est principalement le temps d’exposition dans les mĂ©dias qui est dĂ©cisif. Peu importe qu’on dise du mal ou du bien de ce candidat, c’est le fait d’en parler qui est crucial.

Ce n’est pas pour rien



 que le CSA est censé veiller.

L’un des rĂŽles de cet organisme est de veiller Ă  « la pluralitĂ© » en terme de temps de parole politique en pĂ©riode Ă©lectorale. S’il Ă©tait dĂ©montrĂ© qu’il n’y a aucun lien entre temps de parole et rĂ©sultats des votes, il y a fort Ă  parier que ce rĂŽle n’existerait tout simplement pas.

Ainsi donc, le CSA veille.

Mais comme tant de ces « API » (AutoritĂ© Publique IndĂ©pendante) et autres « Hautes AutoritĂ©s » aux rĂŽles pourtant cruciaux pour le bon fonctionnement de la RĂ©publique, cet organisme n’a aucun pouvoir.

Il peut s’Ă©poumoner autant qu’il veut, publier les chiffres qu’il veut. Aucun problĂšme. Parfois, il va mĂȘme jusqu’Ă  Ă©mettre des « mises en garde ».

Il est purement et simplement ignoré.

Il n’est qu’une entitĂ© fantĂŽme qui ne sert qu’Ă  agiter l’Ă©pouvantail : « Pas d’inquiĂ©tude de ce cĂŽtĂ©-lĂ , on a le CSA qui veille ».

Une loi infĂąme pour Ă©liminer les petits

En avril 2016 est votĂ©e une loi scandaleuse sur les temps de parole. Adieu l’Ă©galitĂ© absolue ! Les temps de parole seront maintenant proportionnels Ă  la « reprĂ©sentativitĂ© » des candidats. Cette loi aux dĂ©finitions floues et subjectives est un nouveau clou enfoncĂ© dans le dos des « petits candidats ». Ils sont petits, qu’ils le restent !

On peut effectivement se dire que, si un clown se prĂ©sente comme candidat, il paraĂźt logique de ne pas trop lui donner la parole pour Ă©viter aux gens de perdre leur temps. Le problĂšme de la loi en question est : qui dĂ©cide ? Les « petits candidats » n’ont-ils rĂ©ellement tous « rien Ă  dire » ? Qui juge qu’ils sont « petits » ?

Quelques précisions

La loi prĂ©cise trois maniĂšres de « calibrer » l’importance des candidats :

  • en fonction des rĂ©sultats obtenus aux plus rĂ©centes Ă©lections par les candidats ou par les partis et groupements politiques qui les soutiennent,
  • en fonction des sondages d’opinion,
  • la contribution de chaque candidat Ă  l’animation du dĂ©bat Ă©lectoral.

Le premier point est totalement hors sol. C’est un peu comme si les opinions des peuples ne changeaient jamais, comme si l’environnement ne se transformait pas, comme si aussi les formations politiques ne variaient jamais leurs discours. Comme si la politique Ă©tait quelque chose de statique. Quel intĂ©rĂȘt Ă  Ă©lire de nouvelles tĂȘtes, dans ce cas ? La loi est clairement faite pour que rien ne change.

Quant au deuxiĂšme point, les « sondages d’opinion » sont financĂ©s par les mĂȘmes qui financent les mĂ©dias. Ils ont donc exactement les mĂȘmes conflits d’intĂ©rĂȘts et mettent donc en avant exactement les mĂȘmes candidats. Qui contrĂŽle le bon fonctionnement de ces sondages ? Ah oui, une autre coquille vide, la « commission des sondages ».

Heureusement que le ridicule ne tue pas, car le dernier point est évidemment une mesure qui se mort la queue. Un candidat ne peut contribuer au débat que si on le laisse parler en premier lieu


Le test du terrain

Prenons un exemple précis pour juger de la pertinence de cette loi.

Le candidat ayant le plus de temps de parole cumulĂ© en janvier 2022 est de trĂšs loin
 Éric Zemmour.

Or, il n’a jamais Ă©tĂ© candidat, n’est pas dans un parti. Par ailleurs, il est crĂ©ditĂ© tout au plus de 15 % des votes.

À l’autre extrĂ©mitĂ© du spectre, tout en bas du graphique, une candidate, Clara Egger, a eu droit Ă  0 secondes de temps de parole dans les principaux mĂ©dias. Pourtant, le programme de cette candidate est axĂ© sur une mesure soutenue par une grande majoritĂ© de Français. En effet, elle soutient le RIC. Un sondage Ifop montre que 73 % des Français y sont favorables.

On a donc d’un cĂŽtĂ© un candidat qui se rĂ©pĂšte en boucle sur tous les plateaux tĂ©lĂ© alors qu’il attire moins d’un Français sur 5, et de l’autre cĂŽtĂ© une candidate soutenant une mesure plĂ©biscitĂ©e par les 3/4 des Français qui n’a pas eu le droit Ă  une seule seconde de temps de parole.

Un véritable scandale


Loin du discours officiel et lissĂ©, les temps de parole sont donc choisis par les mĂ©dias. Évidemment, les discours les plus clivants sont retenus en prioritĂ©, tandis que les idĂ©es qui pourraient rassembler le peuple sont recalĂ©es.

Cela a un impact majeur sur le fonctionnement de la RĂ©publique et de la reprĂ©sentativitĂ© des Ă©lus. En effet, comme l’indique trĂšs justement le blog que j’ai reproduit plus haut, la conclusion qui en dĂ©coule est que :

Le candidat vainqueur de l’Ă©lection n’est pas le candidat privilĂ©giĂ© des Français, mais celui des mĂ©dias.

Ainsi, les quelques milliardaires qui se partagent le contrĂŽle des mĂ©dias sont en rĂ©alitĂ© ceux qui Ă©lisent le futur candidat. Pas vous, cher lecteur, navrĂ© de vous dĂ©livrer peut-ĂȘtre un petit Ă©lectro-choc.

Dans mon roman « Le PrĂ©sident Providentiel », c’est un candidat totalement inconnu du peuple qui se prĂ©sente. PlĂ©biscitĂ© par les mĂ©dias, le rĂ©sultat n’est pas surprenant.

Un petit outil Ă  disposition

Les fichiers du CSA Ă©tant assez indigestes pour le citoyen lambda, je mets Ă  disposition un petit outil pour visualiser les temps de parole des candidats. Il s’agit de graphes qui permettent de voir d’un seul coup d’Ɠil le gouffre qui sĂ©pare les « baleines » des « sauterelles », pour reprendre l’analogie du blog « Notre Époque ».

Pour y accĂ©der, cliquer sur l’image ci-dessous :

On va me dire qu’il y a bien paritĂ© pour les 4 ou 5 premiers candidats. Mais il faut se rendre Ă  l’Ă©vidence, tous sont extrĂȘmement clivants. Par ailleurs, ils se ressemblent tous sur les sujets les plus essentiels :

  • crĂ©ation monĂ©taire,
  • Ă©vasion fiscale,
  • rĂ©partition des richesses,
  • corruption,
  • souverainetĂ© nationale,
  • impuissance du peuple.

OĂč sont les rares candidats qui pourraient changer quelque chose Ă  ces points essentiels ? Ils obtiennent littĂ©ralement mille fois moins de temps de parole que les autres. Autant dire que, pour qu’ils soient Ă©lus, il faudrait un miracle, une licorne statistique, de ce genre :

VisualisĂ© ainsi, c’est dĂ©jĂ  beaucoup plus clair.

Conclusion

La fameuse « paritĂ© des temps de parole » est une vaste farce. Il n’y a strictement aucune paritĂ©, tout le temps de parole est donnĂ© aux futurs vainqueurs Ă©lus par les mĂ©dias.

OĂč sont donc les « autoritĂ©s » censĂ©es s’assurer du « bon fonctionnement » de la RĂ©publique ? Mais que fait la police ? Comment croire encore Ă  la « dĂ©mocratie » pourtant dans toutes les bouches ?

Archive Web – Notre Époque – Élections et temps de parole – Partie 4

Le blog d’origine ayant malheureusement disparu, je reproduis ici le post d’origine. Il est normalement encore disponible sur l’archive de l’internet.

Médias et élections (4) : Internet et temps de parole médiatique

 

Archive Web – Notre Époque – Élections et temps de parole – Partie 3

Le blog d’origine ayant malheureusement disparu, je reproduis ici le post d’origine. Il est normalement encore disponible sur l’archive de l’internet.

L’effrayante corrĂ©lation entre temps de parole et rĂ©sultats des Ă©lections (3) : les mĂ©canismes

 

Archive Web – Notre Époque – Élections et temps de parole – Partie 2

Le blog d’origine ayant malheureusement disparu, je reproduis ici le post d’origine. Il est normalement encore disponible sur l’archive de l’internet.

L’effrayante corrĂ©lation entre temps de parole et rĂ©sultats aux Ă©lections (2) : la confusion des experts

 

Archive Web – Notre Époque – Élections et temps de parole – Partie 1

Le blog d’origine ayant malheureusement disparu, je reproduis ici le post d’origine. Il est normalement encore disponible sur l’archive de l’internet.

L’effrayante corrĂ©lation entre temps de parole et rĂ©sultats aux Ă©lections (1)

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