Comprendre le conflit en Ukraine

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Introduction

Les infos se dĂ©chaĂźnent sur l’Ukraine. Ce qui se passe est trĂšs caractĂ©ristique du monde d’aujourd’hui : cela divise les gens. D’un cĂŽtĂ©, on clame que Poutine est le nouveau Staline opprimant les Ukrainiens. De l’autre, on raconte que Poutine nous sauve des nĂ©o-nazis ukrainiens.

Mais dans le fond, il ne s’agit en fait que d’une ĂšniĂšme guerre par procuration entre la Russie et les États-Unis d’AmĂ©rique.

La Russie ? Évidemment, elle est limitrophe de l’Ukraine. Mais les AmĂ©ricains ? Vraiment ? Qu’est-ce qu’ils feraient donc si loin de leur patrie ?

La géopolitique, la guerre et la manipulation

La géopolitique est toujours complexe. La guerre, en revanche, rend tout noir et blanc. Les médias se transforment immédiatement en outils de propagande. Ils « informent » le public pour pointer du doigt les méchants (eux) et les gentils (nous).

Bien sĂ»r, la piĂšce de monnaie a toujours deux faces. Les « gentils » d’un cĂŽtĂ© sont les mĂ©chants de l’autre, et vice-versa.

Et pourtant, ce n’est jamais ni noir ni blanc.

La PremiĂšre Guerre Mondiale a dĂ©marrĂ© soit-disant par l’assassinat de l’archiduc d’Autriche. Mais dĂšs qu’on s’intĂ©resse d’un peu plus prĂšs aux circonstances qui ont menĂ© Ă  la guerre, on se rend tout de suite compte que c’Ă©tait beaucoup plus complexe que cela. La situation Ă©tait dĂ©jĂ  explosive, et cet Ă©vĂ©nement n’a Ă©tĂ© qu’une petite Ă©tincelle qui a tout embrasĂ©.

On peut en dire autant de la DeuxiĂšme Guerre Mondiale. Pour la comprendre, il faut se renseigner sur le contexte. Y compris les consĂ©quences des traitĂ©s de paix signĂ©s Ă  la fin de la premiĂšre, la crise Ă©conomique des annĂ©es 1930, les tensions existantes entre les diffĂ©rents peuples d’Europe, l’inaction de la France et de la Grande-Bretagne avant qu’il ne soit trop tard, et bien d’autres facteurs.

La guerre en Syrie est un autre exemple de complexitĂ© gĂ©opolitique. Le pĂ©trole. Les intĂ©rĂȘts Ă©conomiques divers. Des cultures et religions diffĂ©rentes qui cohabitent. Des relations prĂ©existantes entre les diffĂ©rents pays de la rĂ©gion, mais aussi Ă  l’international, comme celles entre la Syrie et la Russie.

Ce n’est pas diffĂ©rent pour la crise ukrainienne.

Les ressources de l’Ukraine

L’Ukraine est un trĂšs grand pays en superficie. C’est Ă©galement un partenaire Ă©conomique extrĂȘmement important pour quiconque arrive Ă  nĂ©gocier des partenariats. Elle est trĂšs riche en ressources naturelles, et a les industries qui permettent de transformer ces matiĂšres premiĂšres en produits finis. Cerise sur le gĂąteau, elle bĂ©nĂ©ficie d’un climat trĂšs propice et beaucoup d’eau, qui devient une ressource de plus en plus prĂ©cieuse.

Par ailleurs, sa situation gĂ©ographique en fait un passage obligĂ© pour du transit Ă©conomique, en particulier le gaz russe en direction de l’Europe.

Gazoducs russes amenant le gaz en Europe par l’Ukraine

C’est un tampon entre l’Europe et la Russie. Avec la crise Ă©nergĂ©tique en Europe, son importance est de plus en plus cruciale pour l’Europe.

L’Ukraine est riche en eau. Sais-tu, lecteur, que l’Ukraine a coupĂ© la source principale d’eau potable de la CrimĂ©e lorsque celle-ci a dĂ©clarĂ© son indĂ©pendance en 2014 ? Le barrage mis en place par les Ukrainiens a Ă©tĂ© l’une des toutes premiĂšres cibles lors de l’invasion russe pour rĂ©tablir l’eau en CrimĂ©e.

À cause de tous ces Ă©lĂ©ments, il est Ă©vident que l’Ukraine est un pays d’une importance capitale stratĂ©giquement. Quiconque la contrĂŽle ou s’en fait une alliĂ©e gagne considĂ©rablement en pouvoir. Mais pour comprendre ce qui se passe avec son invasion par la Russie, il est nĂ©cessaire de connaĂźtre aussi l’histoire de ces deux pays.

L’URSS, la Russie et l’OTAN

L’OTAN (Organisation Transatlantique de l’Atlantique Nord, NATO en anglais) ne s’est pas crĂ©Ă©e d’un coup. Il y a d’abord, au sortir de la DeuxiĂšme Guerre Mondiale une sĂ©rie de traitĂ©s entre pays europĂ©ens. Les deux craintes majeures Ă©taient un rĂ©veil de l’Allemagne nazie, d’une part, et une attaque de la part du bloc communiste, d’autre part. Finalement, les États-Unis entrent dans la danse et vont forger la direction principale suivie par l’OTAN : crĂ©er une union pour contrer le Pacte de Varsovie.

En effet, dans le camp communiste, l’URSS et les pays du bloc de l’est sont liĂ©s par ce pacte d’assistance militaire mutuelle. Voici Ă  quoi ressemblaient les deux blocs en 1990, juste avant la dissolution de l’URSS :

Lors de l’effondrement de l’URSS en 1991, les anciens pays du bloc de l’est obtiennent enfin leur indĂ©pendance. Des pays qui existaient avant l’URSS, comme l’Ukraine, la BiĂ©lorussie et les trois pays baltes, renaissent de leurs cendres. Pour acter la dĂ©faite du communisme, la Russie perd des portions de territoire Ă©normes. Et ce tant Ă  l’ouest du cĂŽtĂ© europĂ©en qu’en Asie oĂč le territoire immense du Kazakhstan ainsi que d’autres rĂ©publiques sont maintenant indĂ©pendants.

DĂ©coupage de l’URSS aprĂšs sa chute

Je pense que le dĂ©coupage de l’Ă©poque est Ă  la source de la crise que nous vivons aujourd’hui. Nous y reviendrons.

Les années 1990

Les annĂ©es 1990 sont des annĂ©es trĂšs sombres pour la Russie. La corruption est rampante et ronge le pays. La privatisation de l’ensemble du territoire est un terrain de jeu pour les oligarques qui achĂštent des villes entiĂšres, et se disputent des quartiers Ă  coups de tanks.

Dans le mĂȘme temps, la situation de la population est extrĂȘmement prĂ©caire. L’inflation tue le pouvoir d’achat, les gens n’ont mĂȘme pas de quoi se nourrir. Et, par-dessus tout, le prĂ©sident Eltsine, poivrot invĂ©tĂ©rĂ©, est la risĂ©e du monde entier.

Eltsine ivre, tentant de dĂ©livrer un discours, dĂ©clenchant l’hilaritĂ© de Bill Clinton.

C’Ă©tait Ă©galement des temps difficiles pour tous les pays et nouvelles rĂ©publiques qui venaient de gagner leur indĂ©pendance. Elles Ă©taient souvent dans des Ă©tats Ă©conomiques catastrophiques. Sur le long terme, certaines d’entre-elles ont fini par s’en sortir trĂšs convenablement. D’autres sont encore rongĂ©es par la corruption. C’est mĂȘme le cas pour des pays qui ont rĂ©ussi Ă  entrer dans l’Union EuropĂ©enne comme la Bulgarie et la Roumanie. Mais c’est aussi le cas pour l’Ukraine.

Les difficultĂ©s des annĂ©es 1990 culminent avec les deux guerres de TchĂ©tchĂ©nie. La premiĂšre, de 1994 Ă  1996 est une dĂ©faite cuisante qui ne rĂ©sout absolument rien. Ce n’est finalement qu’en 2002, aprĂšs la prise d’otages du thĂ©Ăątre Ă  Moscou que la crise tchĂ©tchĂšne prend un tournant dĂ©cisif.

Renouveau dans les années 2000

Poutine rĂ©sout le problĂšme tchĂ©tchĂšne, qui Ă©tait secrĂštement soutenu par les Occidentaux, par une guerre sanglante. C’est un message trĂšs clair Ă  ses « partenaires » occidentaux, comme il aime les appeler : « Ne jouez pas avec le feu avec moi ». C’est Ă©galement un message trĂšs fort aux Russes : « Je ne suis pas Eltsine, je vous protĂ©gerai ainsi que votre honneur ».

MalgrĂ© tout, pendant ce temps, l’OTAN s’Ă©tend progressivement Ă  l’est, en incorporant la Pologne, la Hongrie et la TchĂ©quie. On peut d’ailleurs se dire que, l’ours russe Ă©tant de toute façon en pleine dĂ©composition et plus du tout une menace, l’OTAN ne servait en rĂ©alitĂ© plus Ă  rien.

Poutine a commencĂ© Ă  remettre un peu d’ordre en Russie en arrĂȘtant des oligarques, et Ă  restaurer l’Ă©conomie. Dans les faits, le rouble, qui plongeait comme dans un pays sous-dĂ©veloppĂ©, s’est stabilisĂ©. La famine a quasiment disparu. Les infrastructures en ruine ont Ă©tĂ© reconstruites. Oh, tout n’Ă©tait pas parfait, c’est certain. Mais il y a eu des progrĂšs rĂ©els. On peut dire qu’il a ressuscitĂ© l’ours de ses cendres.

Pourtant, internationalement, c’en Ă©tait fini de la Russie. Poutine Ă©tait Ă©cartĂ©, ridiculisĂ©, ignorĂ©, comme si la Russie Ă©tait devenue un pays du Tiers Monde insignifiant. Il a tendu la main Ă  de nombreuses reprises Ă  l’ouest, sans succĂšs. Beaucoup d’analystes internationaux, y compris amĂ©ricains, s’accordent Ă  dire que cette humiliation constante a construit le Poutine d’aujourd’hui.

En 2007, il prononce un discours devenu cĂ©lĂšbre aujourd’hui Ă  Munich. Il y prĂ©vient les Occidentaux des dangers d’un monde unipolaire, oĂč un seul pays, les États-Unis, tentent d’imposer leur marque partout.

L’expansion de l’OTAN

Pendant ce temps, l’OTAN continue de s’agrandir. Et ce, au mĂ©pris total des promesses faites par les États-Unis aux Russes en 1991. En effet, le Pacte de Varsovie n’a Ă©tĂ© dissout qu’aprĂšs avoir eu des assurances que l’OTAN ne s’Ă©tendrait pas Ă  l’est. Malheureusement, ces promesses n’Ă©taient pas Ă©crites, mais on en a encore des traces.

En 2004, l’OTAN se retrouve directement Ă  la frontiĂšre avec la Russie, en intĂ©grant les trois pays baltes. Cela dĂ©clenche l’ire des Russes. La Bulgarie, la Roumanie, la Slovaquie et la SlovĂ©nie intĂšgrent Ă©galement l’OTAN la mĂȘme annĂ©e. La Roumanie autorise mĂȘme les États-Unis Ă  stationner des missiles nuclĂ©aires sur son sol.

En 2008, l’OTAN invite officiellement la Moldavie et l’Ukraine Ă  rentrer dans l’OTAN, mais ce n’est encore qu’au stade de nĂ©gociations. Poutine crie qu’il s’agit d’une ligne rouge Ă  ne pas franchir, personne ne l’Ă©coute.

Bon, aprĂšs tout, l’Ukraine est un pays souverain, elle fait bien ce qu’elle veut ! Non ? Pourtant, il serait bien naĂŻf de s’en tenir Ă  la thĂ©orie sans regarder la rĂ©alitĂ© en face.

Il suffit de se rappeler ce qui s’est passĂ© lorsque l’URSS a tentĂ© d’installer des missiles sur le sol cubain. Nous Ă©tions au bord de la troisiĂšme guerre mondiale. Si les Russes n’avaient pas cĂ©dĂ©, la premiĂšre Ă©tape aurait Ă©tĂ© de raser Cuba, puis potentiellement de basculer dans un conflit ouvert entre les deux blocs. Ce qui se passe aujourd’hui en Ukraine est exactement la mĂȘme chose, les rĂŽles sont simplement inversĂ©s.

MalgrĂ© tout, l’OTAN continue de s’Ă©tendre, pays par pays, ignorant ostensiblement l’ours qui gronde : l’Albanie et la Croatie en 2009, le MontĂ©nĂ©gro en 2017, la MacĂ©doine du Nord en 2020.

GĂ©orgie – 2008

Les Occidentaux continuent leur politique de dĂ©stabilisation de l’ancien bloc de l’est. C’est une tentative Ă©vidente des USA d’obtenir un contrĂŽle total tout autour de la Russie, afin de la neutraliser pour de bon. La gĂ©opolitique est une histoire d’influence. Plus une nation unique en a d’autres Ă  ses pieds, plus nous avançons vers un monde unipolaire. Et plus l’OTAN et les États-Unis ajoutent des missiles autour de la Russie, plus nous nous rapprochons d’une troisiĂšme guerre mondiale. Est-ce que la Russie ou mĂȘme la Chine installent des missiles tout autour des États-Unis ? Pas Ă  ma connaissance.

Mais revenons Ă  la GĂ©orgie. Tout ne s’est pas vraiment passĂ© comme prĂ©vu. En voyant que le Gouvernement Ă©tait de plus en plus phagocytĂ© par l’Occident, les Russes ont commencĂ© par soutenir des rebelles au nord de la GĂ©orgie. En aoĂ»t 2008, les GĂ©orgiens attaquent un bataillon russe qui aidait des rebelles. La rĂ©ponse ne s’est pas fait attendre : l’armĂ©e russe envahit soudainement la GĂ©orgie, provoquant un retrait des troupes gĂ©orgiennes jusqu’Ă  la capitale.

Un accord de paix fut signĂ© trĂšs vite. Depuis, la GĂ©orgie est trĂšs « amicale » avec la Russie, tout en continuant Ă  pas mesurĂ©s son rapprochement avec l’ouest.

Conclusion sur l’OTAN

L’OTAN est bien Ă©videmment une menace pour la Russie, tout comme les missiles soviĂ©tiques Ă  Cuba menaçaient les États-Unis. Au passage, c’est quand mĂȘme pour ça qu’elle a Ă©tĂ© crĂ©Ă©e ! Aucun politicien de bonne foi ne peut le nier. Par ailleurs, l’OTAN s’est tellement dĂ©veloppĂ©e en Europe qu’elle est maintenant aux portes de la Russie, avec des missiles capables de frapper Moscou et au-delĂ . Une carte vaut mille explications :

Pour conclure, j’ajouterais simplement que le diplomate amĂ©ricain Zbigniew BrzeziƄski a Ă©crit que si les États-Unis parvenaient Ă  mettre la main sur l’Ukraine, ce serait la fin de l’influence russe dans le monde. Rien de moins. AprĂšs avoir pris sa retraite, il a prĂ©venu qu’il ne serait pas une bonne chose de prendre l’Ukraine dans l’OTAN.

Les révolutions populaires

Pour comprendre pourquoi les Américains jouent un rÎle prépondérant dans la crise ukrainienne, il faut déjà comprendre leur mode opératoire.

Les printemps arabes

Les printemps arabes ont Ă©branlĂ© le monde arabe depuis 2010. En Tunisie, en Égypte, au BahreĂŻn, en Libye, dans les États Arabes Unis, au YĂ©men, en Arabie Saoudite, le procĂ©dĂ© est toujours le mĂȘme.

Ça dĂ©marre par une Ă©tincelle qui entraĂźne des protestations populaires. Les gens descendent dans la rue, pacifiquement au dĂ©but. Il suffit de financer des milices qui vont alors mettre le feu aux poudres. Elles ont pour cible principale le gouvernement, et crĂ©ent l’environnement nĂ©cessaire pour fomenter un coup d’Ă©tat.

Bien sĂ»r, cette recette ne fonctionne que s’il y a dĂ©jĂ  des rĂ©sistances importantes contre le gouvernement en place. Les rĂ©gimes autoritaires sont des cibles parfaites pour ce genre de manipulations.

L’avantage est Ă©norme : il est possible de renverser un rĂ©gime avec trĂšs peu d’efforts. Par ailleurs, comme tout cela est fait de maniĂšre non officielle, personne ne va venir pointer du doigt le manipulateur.

Malheureusement, les rĂ©sultats ne bĂ©nĂ©ficient pas forcĂ©ment Ă  la population locale. Bien au contraire. Oui, les dictateurs, c’est pas cool, c’est Ă©vident. Mais le chaos, l’instabilitĂ©, la guerre, ont des consĂ©quences encore bien plus funestes pour l’ensemble de la population.

Au passage, aucun pays de ce monde ne va dĂ©penser des millions d’euros, mettre ses propres citoyens en danger, pour « libĂ©rer » des populations civiles Ă©trangĂšres des griffes d’un dictateur. Il faut ĂȘtre trĂšs naĂŻf pour croire un conte de fĂ©es pareil. La dĂ©mocratie, ça s’amĂšne par l’Ă©ducation, pas autrement.

La Libye

La Libye est l’un des exemples le plus frappant, si je puis dire. Il n’y a aucun doute sur le fait que Kadhafi Ă©tait un dictateur. Il rĂ©primait brutalement toute opposition Ă  son rĂ©gime. On ne va pas m’accuser de le nier.

MalgrĂ© tout, son pays Ă©tait en paix, bĂ©nĂ©ficiait d’une Ă©conomie prospĂšre aux infrastructures modernes, l’Ă©ducation et les soins mĂ©dicaux Ă©taient gratuits. Aujourd’hui, 10 ans aprĂšs la « libĂ©ration », c’est un champ de ruines qui manque d’eau et de ressources de premiĂšre nĂ©cessitĂ©, et la guerre continue. C’est Ă©galement devenu une porte corrompue pour faire passer les migrants africains en direction de l’Europe.

Par ailleurs, l’intervention militaire de la France Ă©tait totalement illĂ©gale car non autorisĂ©e dans le territoire d’un pays souverain. Au passage, les motivations n’Ă©taient pas du tout pour « amener la dĂ©mocratie » ou je ne sais quelle fable. Pour rĂ©sumer, Kadhafi Ă©tait une menace pour le pĂ©trodollar, risquait de miner l’influence du franc CFA dans l’ouest africain avec son « dinar or », et Nicolas Sarkozy, alors PrĂ©sident de la France, avait un intĂ©rĂȘt personnel Ă  faire tomber son ancien « pote ».

Dans tous les cas, vis-Ă -vis du droit international, l’intervention française Ă©tait tout aussi illĂ©gale que ce que fait Poutine actuellement. Mais c’Ă©tait la France. Pas un « dictateur ». Mais des « soldats de la paix ». Bien sĂ»r. Exemple typique de propagande noir et blanc que je mentionnais en dĂ©but d’article.

La Syrie

Il y aurait beaucoup Ă  dire sur la Syrie. Je vais m’en tenir Ă  l’essentiel. Les interventions militaires des pays occidentaux (États-Unis, France, Grande-Bretagne, Turquie, IsraĂ«l entre-autres) sont totalement illĂ©gales vis-Ă -vis du droit international. Le moins qu’on puisse dire, c’est que, le droit international, on s’assoit volontiers dessus. Mais on est les gentils, nous. Alors pas besoin de droit.

D’un autre cĂŽtĂ©, les Russes ont Ă©tĂ© invitĂ©s par le pouvoir en place pour venir apporter leur aide. Peu importe ce qu’on pense du sentiment de Poutine pour le Dictateur Assad, je vais donner ma lecture en quelques mots.

La Russie n’a qu’une seule base navale sur la MĂ©diterranĂ©e. Elle se trouve Ă  Tartous, une ville syrienne. Curieusement, la Russie n’est intervenue que lorsque les « rebelles » syriens ont commencĂ© Ă  s’approcher de cette base. Pas avant. Est-ce vraiment une coĂŻncidence ? Je ne sais pas ce qui se serait passĂ© si cette base n’avait pas existĂ©.

De mon point de vue, la Syrie a Ă©tĂ© un tournant dans la psychologie de Poutine. Il a soudain rĂ©alisĂ© que sa puissance militaire Ă©tait plus importante qu’il ne le pensait. Au passage, il a envoyĂ© un message clair Ă  la communautĂ© internationale : l’Occident qui se mĂȘle des affaires d’un pays souverain, ça ne se passe pas toujours comme prĂ©vu.

C’est une humiliation pour les USA, qui ont Ă©videmment des vellĂ©itĂ©s de revanche.

La Biélorussie et le Kazakhstan

Je connais des BiĂ©lorusses, et comme eux, je ne suis pas particuliĂšrement fan de leur gouvernement. Tout comme je n’aime pas du tout tous ces dictateurs aux quatre coins du monde. Il y a eu beaucoup de remous en BiĂ©lorussie dans la derniĂšre dĂ©cennie. Plus rĂ©cemment, on a pu y voir les mĂȘmes tactiques qui ont Ă©tĂ© utilisĂ©es lors des Printemps Arabes. Mettre le bazar. Armer des milices pour que ça dĂ©gĂ©nĂšre. Tenter de dĂ©stabiliser le rĂ©gime.

Mais cette fois, ça n’a pas fonctionnĂ©. La Russie soutient la BiĂ©lorussie et ces tactiques commencent Ă  prendre de l’Ăąge.

La mĂȘme chose est arrivĂ©e au Kazakhstan encore plus rĂ©cemment. Cette fois avec des islamistes radicaux. La Russie a rĂ©agi trĂšs rapidement, la tactique a Ă©chouĂ©, comme en BiĂ©lorussie. La Russie ne peut pas se permettre de perdre le Kazakhstan, territoire immense et qui abrite l’un de ses principaux cosmodromes, BaĂŻkonour.

On dirait bien que les États-Unis devraient envisager de changer leur modus operandi.

La russophobie

La phobie des oppresseurs

Les abus perpĂ©trĂ©s par un groupe finissent toujours par gĂ©nĂ©rer une rĂ©action de haine qui traverse les gĂ©nĂ©rations. Elle reste parfois pendant des siĂšcles. Dans le mĂȘme temps, les oppresseurs tendent de leur cĂŽtĂ© Ă  avoir un sentiment de supĂ©rioritĂ© envers les opprimĂ©s, mĂȘme longtemps aprĂšs que la domination se soit arrĂȘtĂ©e.

Partout dans le monde, on peut voir ce phénomÚne à beaucoup de niveaux :

  • les AmĂ©ricains sont perçus comme des impĂ©rialistes,
  • les Français sont haĂŻs dans leurs anciennes colonies,
  • les « blancs » en gĂ©nĂ©ral sont vus par les « noirs » comme des colonialistes et des esclavagistes, aux États-Unis, mais aussi en Afrique du Sud, etc.
  • la Chine ne s’est toujours pas remise des abus des Occidentaux aux 19Ăšme siĂšcle,
  • etc.

L’impĂ©rialisme soviĂ©tique

Évidemment, le rĂ©gime autoritaire soviĂ©tique n’Ă©tait pas seulement autoritaire envers sa propre population. Il Ă©tait encore pire avec les « rĂ©publiques » qui Ă©taient sous son contrĂŽle. Il n’hĂ©sitait pas Ă  procĂ©der Ă  des purges ethniques, Ă  dĂ©placer des populations entiĂšres, voire Ă  organiser volontairement des famines comme cela a Ă©tĂ© le cas en Ukraine.

La plupart des gens d’un certain Ăąge des pays du bloc de l’est connaissent la langue russe : ils ont Ă©tĂ© obligĂ©s de l’apprendre Ă  l’Ă©cole. Ils cultivent Ă©galement la haine du Russe. C’est particuliĂšrement vrai en Pologne, en TchĂ©quie ainsi que dans les pays baltes. Les bruits des bottes et des chars soviĂ©tiques dans les rues de leurs villes sont encore des cauchemars trĂšs vivaces.

Qui pourrait leur en vouloir ? Pas moi.

Dans les pays baltes, ça se traduit par une situation un peu particuliĂšre. Sous les Soviets, ils ont endurĂ© des dĂ©portations, et surtout une tentative de remplacer la population locale par des Russes, venus d’ailleurs. Vraiment pas chouette. Au passage, ils ont des cultures et langues trĂšs diffĂ©rentes des Russes. Le sentiment nationaliste Ă  leur libĂ©ration a littĂ©ralement explosĂ©. LĂ  encore, difficile de leur en vouloir. Certains Russes qui y vivent ont un statut un peu particulier. Par exemple, en Estonie, ils ne sont ni russes ni estoniens. Ils ont un « passeport gris ». Cela ne pose pas de problĂšme particulier pour vivre mais c’est dire l’impact du passĂ© sur le prĂ©sent. C’est le reflet de cette apprĂ©hension du Russe.

Il y a de l’espoir

MalgrĂ© toutes ces difficultĂ©s, il y a de l’espoir. Je pense ici Ă  l’exemple de l’Allemagne et des Nazis.

Inutile de rappeler la brutalitĂ© des Nazis Ă  travers toute l’Europe, l’histoire est connue. Pourtant, la « haine du Boche » n’a pas persistĂ© trĂšs longtemps. C’est par une auto-flagellation quasiment Ă  l’extrĂȘme que l’Allemagne a fini par faire accepter au monde entier qu’ils ne sont pas des Nazis dans leur ensemble et que l’Allemand moyen n’est pas un SS.

Malheureusement, le sentiment anti-allemand revient en force ces derniĂšres dĂ©cennies, mais il a d’autres sources : elles sont Ă©conomiques. Il devient de plus en plus Ă©vident que l’euro ne sert que l’Allemagne au dĂ©triment des autres pays d’Europe. Mais c’est vraiment un autre sujet.

Ce qu’il est intĂ©ressant de noter ici, c’est qu’un vocabulaire bien particulier peut ĂȘtre utilisĂ©. Il suffit de distinguer ce qui caractĂ©ristique l’oppresseur d’un individu lambda. Lorsqu’on parle de « Nazis » d’un cĂŽtĂ©, et d’« Allemands » de l’autre, les choses sont plus claires. La haine diminue plus facilement.

Il est peut-ĂȘtre temps de prendre des bonnes habitudes et de nommer un chat un chat. L’occupation du Politburo vs citoyens russes. L’État Profond vs citoyens amĂ©ricains. « Le Gouvernement » plutĂŽt que « les Français ». Les marchands d’esclaves vs des citoyens de la France, des USA, etc. Au passage, les « slaves » ont donnĂ© leur nom Ă  l’« esclavage », car ils Ă©taient des esclaves de choix au Moyen-Âge.

Enfin, peut-ĂȘtre que les Polonais peuvent Ă©galement se rappeler que, sans l’intervention de l’URSS, nous serions peut-ĂȘtre tous encore sous le joug nazi.

Vue d’ensemble de la crise ukrainienne

L’Ukraine est le berceau de tous les Slaves. Les Rus de Kiev sont Ă  l’origine de toute la culture russe. Ainsi, l’Ukraine est vue par la grande majoritĂ© des Russes comme la sƓur de la Russie. Beaucoup d’Ukrainiens ont d’ailleurs Ă©galement une vision trĂšs positive de la Russie. Une guerre entre ces deux pays est une guerre fratricide. Et il y a fort Ă  parier que cela va renforcer le sentiment anti-russe.

Les frontiĂšres de l’Ukraine ont beaucoup changĂ© au cours de l’histoire. MalgrĂ© tout, son territoire central a fait partie de la « Grande Russie » pendant des siĂšcles, et l’essentiel de son existence. Le problĂšme Ă©tant que le dĂ©coupage actuel de l’Ukraine regroupe des populations qui ont subi des influences trĂšs diverses.

Une population non uniforme

À l’ouest, la grande majoritĂ© de la population parle ukrainien, une langue slave qui ressemble de loin au russe, mais qui a Ă©tĂ© fortement influencĂ©e par des langues aux frontiĂšres : le polonais Ă  l’ouest, le biĂ©lorusse et les langues baltes au nord. Ces parties de l’ouest ukrainien ont Ă©galement fait partie d’autres pays dans leur histoire : la Pologne et l’Empire Austro-hongrois notamment. Elles sont dĂ©finitivement tournĂ©es vers l’ouest et le reste de l’Europe.

Au contraire, plus on se dĂ©place Ă  l’est, plus les gens parlent russe en passant par des dialectes qui sont des mĂ©langes d’ukrainien et de russe. De maniĂšre gĂ©nĂ©rale, il y a de plus en plus de sympathie pour la Russie dĂšs qu’on se dĂ©place vers l’est.

Plus on s’Ă©loigne du centre du pays, plus les liens culturels et Ă©conomiques se font naturellement avec les pays qui bordent le pays des deux cĂŽtĂ©s. Avec les plus extrĂ©mistes d’un cĂŽtĂ© et de l’autre de part et d’autre du pays.

Pour ceux qui seraient sceptique de cette vision qui peut paraßtre caricaturale, il suffit de regarder les résultats des élections, comme par exemple celles de 2004 :

L’ultra nationalisme

Le sentiment ultra-nationaliste, accompagnĂ© d’une russophobie aiguĂ«, n’existe vraiment que dans l’ouest ukrainien. Le parti nazi Svoboda, le Parti National Socialiste de l’Ukraine (ça ne s’invente pas) en est la manifestation typique. Il a crĂ©Ă© son emblĂšme avec des rĂ©fĂ©rences particuliĂšrement parlantes :

De gauche Ă  droite : la 2Ăšme division SS de Panzers, l’ancien logo de l’ancien parti dont est issu Svoboda, et le logo actuel

Alors, qu’on ne me fasse pas dire ce que je n’ai pas dit. Les partis ultra-nationalistes et les malades existent partout. Autre point Ă  noter, Svoboda n’a Ă  l’heure actuelle qu’un seul siĂšge au Parlement. C’est totalement vrai, ces nazis ne sont qu’une toute petite minoritĂ© lorsqu’on considĂšre l’Ukraine dans son ensemble. Mais malheureusement, ils sont proches de la majoritĂ© dans certaines petites rĂ©gions en fonction des circonstances.

RĂ©sultats de Svoboda aux Ă©lections de 2012, avec un score avoisinant les 40 % dans certains endroits


Par ailleurs, ce qui les distingue particuliĂšrement des autres pays, c’est qu’ils sont aidĂ©s et armĂ©s par le pouvoir en place.

Le multiculturalisme existe ailleurs

Bien sĂ»r, il y a plein de pays dont les populations sont parfois trĂšs hĂ©tĂ©rogĂšnes, et qui s’en sortent trĂšs bien sans se taper dessus. Mais pour que ça fonctionne vraiment, je ne connais que deux recettes. Un dictateur qui va Ă©touffer tout sentiment indĂ©pendantiste. Ou bien une intention scellĂ©e sur le papier de respecter son voisin et d’ĂȘtre en paix.

La Suisse nous en donne un parfait exemple. Quatre cultures et langues cohabitent, et le pays n’a connu aucune guerre depuis deux siĂšcles.

Pour prendre un autre exemple, la situation interne en Ukraine n’est finalement pas trĂšs diffĂ©rente de celle des États-Unis, avec les RĂ©publicains au sud qui correspondent aux Ă©tats sĂ©cessionnistes lors de la guerre civile, et les DĂ©mocrates au nord. Le problĂšme en Ukraine, c’est que ces divisions sont utilisĂ©es par des puissances Ă©trangĂšres pour semer le trouble.

Au 20Ăšme siĂšcle

L’Ukraine tente une premiĂšre fois de prendre son indĂ©pendance en profitant de la RĂ©volution d’Octobre en Russie. Mais ça ne dure pas, l’URSS toute neuve fait main basse sur l’Ukraine en 1922.

Au dĂ©but de la DeuxiĂšme Guerre Mondiale, les Ukrainiens de l’est voient dans la guerre le moyen de se dĂ©tacher du joug russe. Pour rappel, ce sont les plus nationalistes, et certains vont jusqu’Ă  sympathiser avec les Nazis. Les partis extrĂ©mistes d’aujourd’hui n’en sont qu’un hĂ©ritage.

À la fin de la guerre, au vu de la rĂ©sistance des Ukrainiens contre les Bolcheviks, Staline provoque une famine et fait du « nettoyage ». Mais en 1954, l’Ukraine est devenue le « bon Ă©lĂšve » et est l’un des plus gros producteurs du bloc soviĂ©tique. Khrouchtchev dĂ©cide de donner la CrimĂ©e Ă  l’Ukraine en signe de reconnaissance. Une action non sans consĂ©quences plus tard


Dans tous les cas, le sentiment anti-russe, surtout dans l’ouest, provient Ă©videmment de ces dĂ©cennies d’abus. Les premiĂšres actions d’un rĂ©gime autoritaire sont de dĂ©truire toute culture et langue locale. Mais les gens ont tendance Ă  oublier que le Russe moyen d’aujourd’hui n’a plus grand-chose Ă  voir avec Staline.

1991-2004

Avec la chute de l’URSS, l’Ukraine obtient finalement son indĂ©pendance pour de bon. Elle signe des accords avec les USA, la Grande-Bretagne et la Russie qui assurent qu’elle restera un pays souverain, Ă  la condition qu’elle renonce Ă  tout l’arsenal nuclĂ©aire provenant de l’ex-URSS.

De mon point de vue, c’est le dĂ©coupage gĂ©ographique lors de ces accords qui a donnĂ© lieu Ă  la situation que nous vivons aujourd’hui. Mettre ensemble deux populations qui ont la tĂȘte tournĂ©e Ă  l’opposĂ© l’une de l’autre n’Ă©tait peut-ĂȘtre pas la meilleure idĂ©e qui soit. Peu de gens comprennent cela. La Yougoslavie nous a montrĂ© dans les annĂ©es 1990 les consĂ©quences que peuvent avoir une erreur de ce genre. Il y a probablement une leçon Ă  en tirer.

La corruption

Je m’autorise une petite pause historique pour m’arrĂȘter sur un autre problĂšme qui est Ă©galement en partie responsable de la situation actuelle.

La corruption est profondĂ©ment ancrĂ©e en Ukraine, du mĂȘme style que la corruption en Russie dans les annĂ©es 1990.

Depuis, la Russie a su faire un peu de mĂ©nage, mĂȘme s’il reste beaucoup Ă  faire. Mais des oligarques ont Ă©tĂ© arrĂȘtĂ©s, des sanctions et mesures prises pour tenter de limiter les dĂ©gĂąts. Elle a aussi relevĂ© son Ă©conomie et la redistribution de richesses fonctionne dĂ©jĂ  un peu mieux. Elle est parmi les pays du monde ayant la dette publique la plus faible. Tout cela malgrĂ© les sanctions imposĂ©es par l’Occident depuis 2014. Il y a encore beaucoup de dĂ©fis Ă  relever et la corruption y est encore Ă©levĂ©e, mais la situation n’a plus rien Ă  voir avec ce qu’elle Ă©tait dans les annĂ©es 1990. Et avant de critiquer, nous pourrions dĂ©jĂ  nous regarder dans la glace


En Ukraine, en revanche, tout cela n’a pas eu lieu. Le rĂ©sultat est que, malgrĂ© une industrie et un secteur agricole extrĂȘmement productifs, des ressources naturelles en pagaille, la pauvretĂ© est toujours un problĂšme Ă©norme. Je recommande un documentaire qui montre l’un des symptĂŽmes : les orphelins de la rue (en anglais). En 2012, Ernst and Young classe l’Ukraine parmi les trois premiers pays les plus corrompus du monde. Elle est neuviĂšme en 2017. La situation s’amĂ©liore trĂšs trĂšs lentement, mais l’Ukraine reste l’un des pays les plus corrompus au monde.

L’Ukraine est parmi les 4 pays les plus citĂ©s dans les derniĂšres rĂ©vĂ©lations en date, l’affaire du CrĂ©dit Suisse :

Au passage, le prĂ©sident lui-mĂȘme est aussi enfoncĂ© dans la boue, malgrĂ© de grands discours anti-corruption.

2004 : La RĂ©volution Orange

Revenons à notre voyage dans le temps. En 2004, deux candidats sont en lice pour la présidence :

  • Viktor Iouchtchenko appuyĂ© par Ioulia Tymochenko => camp occidental
  • Viktor Ianoukovytch => pro-russe

Tous deux reçoivent de l’aide de leur camp respectif. Russes d’un cĂŽtĂ©, et de l’autre des fondations comme la Fondation Soros ou la Freedom House et autres organisations amĂ©ricaines « pour la dĂ©mocratie » (lire : pour faire des coups d’Ă©tat et renverser les gouvernements qui ne sont pas alignĂ©s avec les USA).

Il se trouve que, manque de chance, le pro-russe Ianoukovytch est élu de justesse. Des manifestations sont organisées à Kiev, évidemment organisées et orchestrées par les Occidentaux, pas trop contents. Les élections sont annulées. Iouchtchenko est mystérieusement empoisonné (je te laisse deviner par qui) mais survit. Il est cette fois élu lui-aussi de justesse. Pas de protestations. Les gentils ont gagné.

L’un des facteurs majeurs ici est de savoir que Kiev se situe dans la partie « pro-occidentale » de l’Ukraine. Il est donc beaucoup plus facile d’y organiser un renversement de rĂ©gime pour les Occidentaux que pour les Russes.

La claque de 2010

La crise de 2008 passe par lĂ , le bilan de Iouchtchenko est assez catastrophique, et c’est Ianoukovytch qui l’emporte lors des Ă©lections de 2010, cette fois sans protestations. Il semblerait que les Russes aient gagnĂ©. Mais c’est seulement parce que Ianoukovytch a lancĂ© des signes qui indiquent qu’il a l’intention de se rapprocher de l’Occident.

En effet, il commence Ă  nĂ©gocier des accords Ă©conomiques avec l’Union EuropĂ©enne. Cela ne fait pas du tout l’affaire des gens de son parti, qui sont particuliĂšrement inquiets des rĂ©percussions qu’un accord avec les EuropĂ©ens pourraient avoir sur leurs propres relations avec la Russie cĂŽtĂ© est. MalgrĂ© tout, il donne l’espoir Ă  la population qu’une ouverture est possible. Quelques mois plus tard, il envoie tout balader d’un coup et se tourne soudain vers Moscou. Difficile de savoir ce qui a provoquĂ© ce changement d’humeur.

2013 MaĂŻdan

Malheureusement, si l’espoir fait vivre, la dĂ©ception est source de violence. Des manifestations commencent Ă  Kiev, dans la place MaĂŻdan, pour protester contre ce revirement soudain.

LĂ  oĂč ça devient intĂ©ressant, c’est qu’on voit des diplomates europĂ©ens et amĂ©ricains venir soutenir les manifestants en personne. Que dirions-nous si des diplomates russes venaient se mĂȘler aux manifs des gilets jaunes pour les soutenir ? Ce serait clairement inacceptable.

Ah, mais non. Nous, on est les gentils. Donc ça va.

Le sénateur américain McCain au milieu des manifestants

Et dans le mĂȘme temps, les AmĂ©ricains utilisent la mĂȘme tactique que dans les RĂ©volutions Arabes. Ils se servent cette fois des extrĂ©mistes nazis de l’ouest pour faire le sale boulot. Ces organisation radicales jouent un rĂŽle dĂ©cisif dans la tournure que vont prendre les Ă©vĂ©nements. Ne reculant devant rien, des snipers tirent dans les manifestants et dans les policiers pour provoquer l’escalade.

De trĂšs sympathiques snipers de MaĂŻdan
 au passage, il me semble voir quelques drapeaux intĂ©ressants sur cette photo (oui oui, c’est bien le drapeau de l’OTAN Ă  gauche)

Ça fonctionne. Le gouvernement est renversĂ©.

L’implication occidentale

Bon, mis Ă  part les sĂ©nateurs occidentaux qui vont faire les beaux dans les manifs, on pourrait se dire que tout ça est finalement une affaire interne Ă  l’Ukraine. Mais ça ne s’arrĂȘte pas lĂ .

L’Occident a soutenu financiĂšrement des organisations nazies. Tout est bon dans le cochon. Pire, les soutiens sont carrĂ©ment officiels. D’ailleurs, un enregistrement rĂ©vĂ©lera plus tard que la Sous-SecrĂ©taire d’État amĂ©ricaine, Victoria Nuland, a appelĂ© l’ambassadeur amĂ©ricain en Ukraine pour lui indiquer qui il fallait mettre au pouvoir. Tout en ajoutant « que les EuropĂ©ens aillent se faire voir » (avec le mot en F en anglais, oui oui).

La photo suivante est particuliĂšrement parlante. L’homme au milieu est le chef de Nuland, John Kerry, SecrĂ©taire d’État des États-Unis. On comprend qu’il soit content, mais quand mĂȘme
 Ă  gauche Oleksandr Tourtchynov le nouveau prĂ©sident par intĂ©rim de l’Ukraine aprĂšs le coup d’Ă©tat, et Ă  droite le Premier Ministre Arseni Yatsenjouk. Mais pas d’inquiĂ©tude, on est les gentils !

Si j’Ă©tais ukrainien, avec tout ça j’aurais un peu l’impression d’ĂȘtre pris pour un imbĂ©cile. Mais passons.

Évidemment, sans surprise, le nouveau gouvernement est composĂ© quasiment de membres pro-ouest.

Au passage, comme je m’intĂ©resse beaucoup Ă  la monnaie, voici le nouveau billet ukrainien de 500 Hryven :

Il y a tout de suite un truc qui m’a sautĂ© aux yeux
 si je puis dire. Au centre, on a un clin d’Ɠil
 enfin une rĂ©fĂ©rence assez Ă©vidente, quoi, au billet amĂ©ricain :

En tout cas, ces Ă©vĂ©nements sont une vĂ©ritable catastrophe pour les Russes qui n’ont pas rĂ©ussi Ă  stopper le coup d’Ă©tat. Et la partie russophone de l’est ukrainien ne voit pas tout cela d’un bon Ɠil, justement.

Imaginons un instant le Mexique


D’une certaine maniĂšre le Mexique est aux États-Unis ce que l’Ukraine est Ă  la Russie. Une large frontiĂšre commune. Des interactions Ă©conomiques fortes. Un relatif continuum de populations Ă  la frontiĂšre.

Imaginons maintenant un soulĂšvement au Mexique, orchestrĂ© par la Russie qui financerait des guĂ©rilleros mexicains pour Ă©jecter le gouvernement, avec en plus le soutien ouvert des officiels russes. Par-dessus le marchĂ©, une fois le nouveau gouvernement fantoche mis en place par les Russes, le Mexique signe une coopĂ©ration militaire avec la Russie, en mĂ©moire de la guerre perdue contre les États-Unis au XIXĂšme siĂšcle, permettant l’installation d’ogives nuclĂ©aires au nord du Mexique, histoire aussi de bien montrer leur dĂ©saccord avec le mur Ă  la frontiĂšre.

Il se passerait quoi Ă  ton avis, cher lecteur ? Les États-Unis resteraient-ils les bras croisĂ©s ?

Oui, je suis d’accord, Poutine n’est pas tout blanc, loin de lĂ . Mais la nature explosive de la situation en Ukraine est causĂ©e en premier lieu par les abus et l’arrogance visible des Occidentaux. Pour clore le dĂ©bat, voici le prĂ©sident ukrainien (Ă  gauche), Volodymyr Zelensky implorant l’OTAN en dĂ©cembre 2021 d’accepter l’Ukraine en son sein. Ce qui peut expliquer en grande partie les Ă©vĂ©nements qui ont suivi.

Le Donbass et la Crimée

Le Donbass, une rĂ©gion Ă  l’extrĂȘme est de l’Ukraine, et la CrimĂ©e, une pĂ©ninsule au sud, ont une large majoritĂ© de locuteurs russes. AprĂšs le coup d’Ă©tat de MaĂŻdan, ces deux parties du pays rejettent massivement Porochenko, le nouveau prĂ©sident.

Par ailleurs, le nouveau gouvernement de Kiev s’attaque de plus en plus Ă  la langue russe et tente d’en bannir l’usage par des lois, ce qui provoque un mĂ©contentement bien comprĂ©hensible Ă  l’est.

La Crimée

En CrimĂ©e, le processus est rapide. L’une des raisons est que la pĂ©ninsule est isolĂ©e gĂ©ographiquement de l’Ukraine par un isthme, et donc beaucoup plus difficile Ă  atteindre pour les forces ukrainiennes. Un rĂ©fĂ©rendum est organisĂ©, lors duquel les crimĂ©ens appellent Ă  rejoindre la Russie avec un score sans appel de 96,77 %.

Bien sĂ»r, la Russie est derriĂšre tout cela, c’est une Ă©vidence. Peut-on questionner la lĂ©gitimitĂ© du rĂ©fĂ©rendum ? Sans doute. Mais il est tout de mĂȘme avĂ©rĂ© que les crimĂ©ens sont historiquement beaucoup plus proches des Russes que des Ukrainiens. Pour rappel, elle n’a Ă©tĂ© donnĂ©e Ă  l’Ukraine qu’en 1954.

Alors, est-ce pour le meilleur ou pour le pire ? Je pense que si la CrimĂ©e Ă©tait restĂ©e en Ukraine, son sort n’aurait pas Ă©tĂ© bien diffĂ©rent de celui du Donbass. Pourquoi Poutine est-il intervenu si rapidement dans la pĂ©ninsule, alors qu’il a laissĂ© pourrir la situation plus au nord ? La rĂ©ponse me paraĂźt Ă©vidente : SĂ©bastopol, la ville principale, qui est la plus grande base militaire russe sur la Mer Noire. La ville a d’ailleurs un statut spĂ©cial et est restĂ©e russe mĂȘme aprĂšs l’indĂ©pendance de l’Ukraine.

En tout cas, l’« annexion » de la CrimĂ©e par la Russie, donc par les mĂ©chants, a donnĂ© lieu Ă  des sanctions internationales contre l’Ă©conomie russe.

Quant Ă  la lĂ©galitĂ© du procĂ©dĂ©, il a un prĂ©cĂ©dent. En 2008, le Kosovo, une province officielle de la Serbie, a dĂ©clarĂ© son indĂ©pendance, approuvĂ©e « lĂ©galement » par les États-Unis et une bonne partie des pays du monde. Mais c’Ă©tait les gentils, alors ça ne pose pas de problĂšme.

Le Donbass

Au Donbass, en revanche, la situation est beaucoup plus compliquĂ©e. Les insurgents ont pourtant eux-aussi saisi les bĂątiments administratifs et on pris de facto le contrĂŽle des territoires et dĂ©clarĂ© leur indĂ©pendance. La Russie n’a pourtant pas reconnu ces territoires. Évidemment, les Occidentaux non plus. Il ne faudrait tout de mĂȘme pas exagĂ©rer. Quelle diffĂ©rence avec le Kosovo ? Il y a eu aussi des massacres de pro-Russes en Ukraine en particulier lors de l’Ă©pisode MaĂŻdan ainsi qu’Ă  Odessa, ce qui rend la situation finalement trĂšs proche de celle du Kosovo en son temps.

En tout cas, depuis, c’est la guerre civile, aidĂ©e bien Ă©videmment par les Russes, tout contents de pouvoir crĂ©er de l’instabilitĂ© dans cette Ukraine tombĂ©e dans les mains occidentales. Quand je dis « guerre civile », il ne s’agit pas de quelques coups de feu par-ci par-lĂ . Cette guerre a fait la bagatelle de 14.000 morts depuis 2014, dont au moins 3.000 civils. C’est une vraie guerre, au milieu des civils.

Peu de gens parlent de cette guerre, comme si elle n’existait pas et que tout allait bien en Ukraine. Il est indispensable de comprendre que la population locale est particuliĂšrement remontĂ©e contre le pouvoir central et soutient activement les sĂ©paratistes, sinon cette guerre n’aurait pas pu durer aussi longtemps.

Les accords de Minsk (1 et 2)

Les sĂ©paratistes et le gouvernement ukrainien tentent des nĂ©gociations. Ils signent par deux fois des accords de paix et de dĂ©sescalade des tensions militaires Ă  Minsk. Mais ceux-ci ne sont pas respectĂ©s, en particulier par les Ukrainiens. Il est clair qu’aprĂšs 8 ans Ă  s’envoyer des tirs de mortiers et autres obus, la situation n’est pas prĂšs d’ĂȘtre rĂ©solue.

Bien sĂ»r, comme je l’ai dĂ©jĂ  mentionnĂ©, les Russes n’y sont pas pour rien dans cette histoire. Poutine ne veut Ă©videmment pas que l’Ukraine devienne un vassal des États-Unis. La frontiĂšre entre l’Ukraine et la Russie fait 1500 km. De ce point de vue, avoir les troupes amĂ©ricaines tout le long deviendrait un cauchemar. Non seulement pour la Russie, mais pour la paix dans le monde tout court. Pas besoin d’ĂȘtre sorti des Mines pour le comprendre.

Les USA utilisent la force partout oĂč ils le jugent nĂ©cessaire
 c’est-Ă -dire partout. Comme je l’ai mentionnĂ© dans mon livre « La monnaie : ce qu’on ignore », la section 301 de la loi amĂ©ricaine de 1974, qui est toujours appliquĂ©e aujourd’hui, « autorise le PrĂ©sident Ă  prendre toute mesure appropriĂ©e [
] pour obtenir le retrait de tout acte, politique ou pratique d’un gouvernement Ă©tranger [
] qui restreindrait le commerce avec les États-Unis ». ImpĂ©rialisme, quand tu nous tiens.

Volodymyr Zelensky

Faisons un petit zoom sur le prĂ©sident Zelensky. Il a accĂ©dĂ© au pouvoir par des moyens assez peu conventionnels. On peut d’ailleurs le comparer Ă  Macron en France, ou Trudeau au Canada. Sa campagne n’a pas Ă©tĂ© « classique » :

  • il n’est pas politicien professionnel, c’est un comĂ©dien hĂ©ros d’une sĂ©rie tĂ©lĂ© oĂč il jouait justement son propre rĂŽle de « type normal » devenant prĂ©sident, une sorte de prophĂ©tie auto-rĂ©alisatrice, et promet un « renouveau en politique »,
  • un homme assez jeune pour la fonction prĂ©sidentielle, avec une campagne particuliĂšrement axĂ©e sur sa personne plutĂŽt que sur des idĂ©es,
  • l’usage de nouvelles technologies et des rĂ©seaux sociaux,
  • beaucoup de promesses non tenues et une chute dans les sondages peu aprĂšs son Ă©lection.

Par ailleurs, alors qu’il a jurĂ© de combattre la corruption, le « serviteur du peuple » est lui-mĂȘme en plein dedans. Son principal soutien, Igor Kolomoisky, un oligarque anti-amĂ©ricain, possĂšde la plus grande chaĂźne de tĂ©lĂ©vision. Mais il est aussi rĂ©guliĂšrement impliquĂ© dans des scandales de corruption.

Les Pandora Papers rĂ©vĂšlent en outre que Zelensky possĂ©dait un compte offshore, cĂ©dĂ© peu avant son Ă©lection Ă  un ami
 hum. Serviteur du peuple, mon Ɠil.

En fait, les Ukrainiens eux-mĂȘmes ne sont pas ravis de leur prĂ©sident. Voici les rĂ©sultats de sondages en 2021, par un site qui n’a pas d’affiliation avec les Russes et qu’on peut donc qualifier de « neutre » :

Réponses à la question « En général, approuvez-vous les activités de Volodymyr Zelensky ou non »

Sa popularitĂ©, dĂ©jĂ  bien entamĂ©e en juin 2021, descend encore davantage avec 28 % d’opinion favorable.

Je ne serais pas surpris d’apprendre que l’oligarque s’est senti trahi et s’est finalement tournĂ© vers Poutine.

Les demandes russes

En dĂ©cembre 2021, les Russes envoient aux Occidentaux une liste formelle de demandes. C’est de mon point de vue un piĂšge car Poutine sait parfaitement que ses « partenaires » ne signeront jamais. Ils l’auraient fait depuis longtemps s’ils l’avaient voulu. Mais il veut tenter de tendre la main une derniĂšre fois.

Évidemment, ces demandes sont purement et simplement ignorĂ©es, et la rĂ©ponse parle de demandes de la part des Occidentaux, totalement diffĂ©rentes.

Aurions-nous pu Ă©viter la guerre en Ukraine ? Oui. J’en suis persuadĂ©. Si les EuropĂ©ens ou les AmĂ©ricains avaient au moins pris ces demandes au sĂ©rieux, il y avait de trĂšs fortes chances d’Ă©viter une guerre militaire. À la place, Macron nous a fait un grand cirque, a jouĂ© des mĂ©caniques en se faisant passer pour le Saint Sauveur en clamant que Poutine lui avait promis de ne pas attaquer l’Ukraine. Ce que le Kremlin a formellement dĂ©menti dans la foulĂ©e. Quel clown !

Il est bien malheureux de constater que personne n’a pris Poutine au sĂ©rieux. Comme toujours. Mais Ă©videmment, cela ne justifie pas, ne justifiera jamais, un conflit armĂ©.

La dĂ©cision d’attaquer

Difficile de dire ce qui a dĂ©clenchĂ© la dĂ©cision finale de lancer l’assaut contre l’Ukraine. C’est d’autant plus surprenant que la date choisie est un contresens total en terme militaire. En effet, c’est la pĂ©riode de l’annĂ©e oĂč les champs se transforment en boue. De fait, les colonnes militaires sont totalement coincĂ©es sur les axes routiers, ce qui fait des cibles parfaites. Si l’attaque avait Ă©tĂ© prĂ©vue de longue date, elle aurait eu lieu en Ă©tĂ© ou en plein cƓur de l’hiver.

Difficile, donc, de savoir ce qui a motivĂ© Poutine Ă  prendre cette dĂ©cision soudaine. Je pense que c’est un ensemble de facteurs. Il me semble que l’expĂ©rience syrienne lui a donnĂ© une assurance de ce dont son armĂ©e Ă©tait capable. Les rĂ©cents Ă©vĂ©nements au Kazakhstan l’ont probablement sĂ©rieusement irritĂ©. Et la rĂ©cente provocation de Zelensky demandant Ă  rejoindre l’OTAN a vraisemblablement Ă©tĂ© la goutte de trop.

Petit rappel d’Ă©vĂ©nements marquants de l’attaque sur l’Ukraine, qui ne sont de toute façon que des prĂ©textes, la dĂ©cision Ă©tait dĂ©jĂ  prise Ă  mon avis Ă  ce moment-lĂ  :

  • 21 fĂ©vrier : attaques d’une position russe Ă  la frontiĂšre par les Ukrainiens,
  • 22 : la Russie reconnaĂźt les deux rĂ©publiques sĂ©paratistes Ă  l’est dans le Donbass, envoie des troupes pour « maintenir la paix »,
  • 23 : dĂ©ploiement au Donbass, Poutine dĂ©clare vouloir « dĂ©militariser » et « « dĂ©nazifier » l’Ukraine qui menace l’intĂ©gritĂ© de la Russie, un discours de guerre trĂšs classique pour faire peur,
  • 24 : attaque de l’Ukraine par le nord, l’est et le sud, avec bombardement de zones militaires pour tenter de prendre le contrĂŽle de l’espace aĂ©rien,
  • 25 : l’armĂ©e russe fonce sur Kiev.

Personne ne peut prĂ©dire ce qui va advenir. Il semblerait que les Ukrainiens, armĂ©s massivement par les Occidentaux, offrent plus de rĂ©sistance que prĂ©vu Ă  l’avance des troupes russes.

Les buts de Poutine

Évidemment, je ne suis pas dans sa tĂȘte. MalgrĂ© tout, il me semble que les buts qu’il poursuit sont trĂšs clairs.

Je ne crois pas une seconde qu’il veuille occuper l’Ukraine sur le long terme. Toutes les invasions de ce type ont conduit Ă  des conflits de guĂ©rilla interminables et impossibles Ă  gagner lorsqu’on n’a pas le soutien de la population, et il le sait. Peu importe ce qu’on pense de lui, c’est un fin tacticien, il ne ferait pas une erreur aussi grossiĂšre.

Il veut se dĂ©barrasser de Zelensky, c’est indĂ©niable. Et probablement mettre un prĂ©sident pro-russe au pouvoir. Le peut-il ? Cela reste Ă  voir.

Il est parfaitement possible qu’il veuille couper l’Ukraine en deux. Cela aurait l’avantage de rĂ©gler les problĂšmes internes. Et cela lui ferait le pays tampon dont il a besoin du cĂŽtĂ© est. Tant pis si l’ouest bascule du cĂŽtĂ© atlantiste. Ce serait en tout cas gagnant-gagnant pour lui, surtout s’il contrĂŽle le fleuve Dniepr au milieu. L’est ukrainien contient beaucoup de ressources et des industries lourdes, ce qui lui permettrait de renforcer et diversifier l’Ă©conomie russe.

Évidemment, l’un des autres buts est de dĂ©livrer un message trĂšs clair aux Occidentaux : ne m’ignorez plus, je ne rigole pas, ne franchissez pas mes lignes rouges. En d’autres termes, l’Ukraine ne devrait jamais faire partie de l’OTAN, inutile d’en rĂȘver.

Une guerre mondiale ?

Est-ce que Poutine veut un conflit international ? Non, je ne pense pas.

Les États-Unis et l’Union EuropĂ©enne, en revanche, ne refuseraient probablement pas une petite guerre en ce moment. Je parle Ă©videmment des fous qui nous gouvernent, pas du peuple, qui n’a jamais envie de guerre. Mais les pays occidentaux ont beaucoup de problĂšmes avec des populations de plus en plus opposĂ©es Ă  leurs gouvernements, une dette massive et irremboursable, une crise Ă©conomique et Ă©nergĂ©tique qui n’ont pas de solutions.

À l’inverse, la Russie n’a quasiment pas de dette, a du gaz Ă  ne pas savoir qu’en faire, et le gouvernement n’a pas particuliĂšrement de problĂšmes avec sa population. Poutine n’a aucune raison particuliĂšre de faire la guerre, si ce n’est pour montrer qu’il en a raz-le-bol qu’on se paie sa tĂȘte. Une chose est sĂ»re, l’ours est Ă©nervĂ©.

Conclusion

Que va-t-il se passer ? Je n’en sais rien, je ne suis pas mĂ©dium. MĂȘme si elle ne semble pas vraiment se passer comme prĂ©vu, je pense que cette guerre ne va pas durer trĂšs longtemps. Les Russes ont Ă  mon avis attaquĂ© beaucoup trop tard dans la saison, ils auraient dĂ» attaquer au cƓur de l’hiver pour un « blitz ». Nous allons tous suer pendant un moment
 il va y avoir des dĂ©gĂąts. Mais je pense que Poutine va finalement obtenir ce qu’il demande depuis des annĂ©es, voire des dĂ©cennies : ĂȘtre entendu.

Les Occidentaux ne sont pas vraiment prĂ©parĂ©s Ă  une guerre. La Russie, elle, l’est, et a un avantage technologique au niveau militaire. Les Ukrainiens vont devoir se bagarrer tout seuls, et il me semble qu’il n’est que pure folie de leur donner davantage de matĂ©riel. Cela ne fait que retarder l’inĂ©vitable, tout en augmentant les chances de dĂ©rapages et les morts. Mais il faut bien Ă©couler le matos et se faire des cacahuĂštes en or.

Bien sĂ»r, si l’OTAN dĂ©cidait d’intervenir, cela pourrait conduire Ă  la catastrophe. C’est impossible. Enfin, ça le serait si on n’Ă©tait pas gouvernĂ©s par des pyromanes.

Est-ce que j’aime la situation actuelle ? Non, Ă©videmment. J’aime la France suffisamment pour ĂȘtre atterrĂ© de voir qu’on en est arrivĂ©s lĂ . Est-ce que Poutine est seul coupable ? Je pense qu’aprĂšs avoir lu autant de paragraphes, il est Ă©vident que la situation n’est ni blanche ni noire. En fait, les pays Occidentaux sont totalement responsables de l’escalade de ces deux derniĂšres dĂ©cennies.

C’est un peu comme quelqu’un qui te harcĂšle continuellement en te filant des claques Ă  rĂ©pĂ©tition. ExaspĂ©rĂ©, tu lances le premier coup de poing et du coup tu es seul responsable. Vraiment ?

Ma seule inquiétude est que cela crée un précédent qui inviterait les Chinois à attaquer Taïwan. Pas sûr que ça se passe aussi bien.

Le scandale des temps de parole

L’Arcom, anciennement CSA, est en charge de surveiller les temps de parole des candidats dans les mĂ©dias avant une Ă©lection.

Mais
 pourquoi donc surveiller les temps de parole ? AprĂšs tout, c’est Ă  chaque citoyen de voter en son Ăąme et conscience pour le candidat qui lui plaĂźt le plus.

Non ?

Les temps de parole décident du candidat élu

L’excellent blog « Notre Époque » a fait un excellent travail de recherches (y compris bibliographique) sur le sujet. Malheureusement, ce blog a disparu. J’ai donc reproduit les articles de l’Ă©poque sur mon propre blog Ă  des fins d’archives :

Les conclusions sont sans appel : le pourcentage de temps de parole dans les mĂ©dias permet d’avoir un pourcentage de votes Ă©quivalent lors de l’Ă©lection. C’est une relation directe, immuable, mathĂ©matique.

Ni plus, ni moins.

Il y a des Ă©tudes Ă©parpillĂ©es Ă  l’Ă©tranger, car c’est un sujet assez peu Ă©tudiĂ©, qui arrivent aux mĂȘmes conclusions. Certaines vont mĂȘme d’ailleurs plus loin : le contenu positif ou nĂ©gatif pour un candidat n’a que peu d’importance. C’est principalement le temps d’exposition dans les mĂ©dias qui est dĂ©cisif. Peu importe qu’on dise du mal ou du bien de ce candidat, c’est le fait d’en parler qui est crucial.

Ce n’est pas pour rien



 que le CSA est censé veiller.

L’un des rĂŽles de cet organisme est de veiller Ă  « la pluralitĂ© » en terme de temps de parole politique en pĂ©riode Ă©lectorale. S’il Ă©tait dĂ©montrĂ© qu’il n’y a aucun lien entre temps de parole et rĂ©sultats des votes, il y a fort Ă  parier que ce rĂŽle n’existerait tout simplement pas.

Ainsi donc, le CSA veille.

Mais comme tant de ces « API » (AutoritĂ© Publique IndĂ©pendante) et autres « Hautes AutoritĂ©s » aux rĂŽles pourtant cruciaux pour le bon fonctionnement de la RĂ©publique, cet organisme n’a aucun pouvoir.

Il peut s’Ă©poumoner autant qu’il veut, publier les chiffres qu’il veut. Aucun problĂšme. Parfois, il va mĂȘme jusqu’Ă  Ă©mettre des « mises en garde ».

Il est purement et simplement ignoré.

Il n’est qu’une entitĂ© fantĂŽme qui ne sert qu’Ă  agiter l’Ă©pouvantail : « Pas d’inquiĂ©tude de ce cĂŽtĂ©-lĂ , on a le CSA qui veille ».

Une loi infĂąme pour Ă©liminer les petits

En avril 2016 est votĂ©e une loi scandaleuse sur les temps de parole. Adieu l’Ă©galitĂ© absolue ! Les temps de parole seront maintenant proportionnels Ă  la « reprĂ©sentativitĂ© » des candidats. Cette loi aux dĂ©finitions floues et subjectives est un nouveau clou enfoncĂ© dans le dos des « petits candidats ». Ils sont petits, qu’ils le restent !

On peut effectivement se dire que, si un clown se prĂ©sente comme candidat, il paraĂźt logique de ne pas trop lui donner la parole pour Ă©viter aux gens de perdre leur temps. Le problĂšme de la loi en question est : qui dĂ©cide ? Les « petits candidats » n’ont-ils rĂ©ellement tous « rien Ă  dire » ? Qui juge qu’ils sont « petits » ?

Quelques précisions

La loi prĂ©cise trois maniĂšres de « calibrer » l’importance des candidats :

  • en fonction des rĂ©sultats obtenus aux plus rĂ©centes Ă©lections par les candidats ou par les partis et groupements politiques qui les soutiennent,
  • en fonction des sondages d’opinion,
  • la contribution de chaque candidat Ă  l’animation du dĂ©bat Ă©lectoral.

Le premier point est totalement hors sol. C’est un peu comme si les opinions des peuples ne changeaient jamais, comme si l’environnement ne se transformait pas, comme si aussi les formations politiques ne variaient jamais leurs discours. Comme si la politique Ă©tait quelque chose de statique. Quel intĂ©rĂȘt Ă  Ă©lire de nouvelles tĂȘtes, dans ce cas ? La loi est clairement faite pour que rien ne change.

Quant au deuxiĂšme point, les « sondages d’opinion » sont financĂ©s par les mĂȘmes qui financent les mĂ©dias. Ils ont donc exactement les mĂȘmes conflits d’intĂ©rĂȘts et mettent donc en avant exactement les mĂȘmes candidats. Qui contrĂŽle le bon fonctionnement de ces sondages ? Ah oui, une autre coquille vide, la « commission des sondages ».

Heureusement que le ridicule ne tue pas, car le dernier point est évidemment une mesure qui se mort la queue. Un candidat ne peut contribuer au débat que si on le laisse parler en premier lieu


Le test du terrain

Prenons un exemple précis pour juger de la pertinence de cette loi.

Le candidat ayant le plus de temps de parole cumulĂ© en janvier 2022 est de trĂšs loin
 Éric Zemmour.

Or, il n’a jamais Ă©tĂ© candidat, n’est pas dans un parti. Par ailleurs, il est crĂ©ditĂ© tout au plus de 15 % des votes.

À l’autre extrĂ©mitĂ© du spectre, tout en bas du graphique, une candidate, Clara Egger, a eu droit Ă  0 secondes de temps de parole dans les principaux mĂ©dias. Pourtant, le programme de cette candidate est axĂ© sur une mesure soutenue par une grande majoritĂ© de Français. En effet, elle soutient le RIC. Un sondage Ifop montre que 73 % des Français y sont favorables.

On a donc d’un cĂŽtĂ© un candidat qui se rĂ©pĂšte en boucle sur tous les plateaux tĂ©lĂ© alors qu’il attire moins d’un Français sur 5, et de l’autre cĂŽtĂ© une candidate soutenant une mesure plĂ©biscitĂ©e par les 3/4 des Français qui n’a pas eu le droit Ă  une seule seconde de temps de parole.

Un véritable scandale


Loin du discours officiel et lissĂ©, les temps de parole sont donc choisis par les mĂ©dias. Évidemment, les discours les plus clivants sont retenus en prioritĂ©, tandis que les idĂ©es qui pourraient rassembler le peuple sont recalĂ©es.

Cela a un impact majeur sur le fonctionnement de la RĂ©publique et de la reprĂ©sentativitĂ© des Ă©lus. En effet, comme l’indique trĂšs justement le blog que j’ai reproduit plus haut, la conclusion qui en dĂ©coule est que :

Le candidat vainqueur de l’Ă©lection n’est pas le candidat privilĂ©giĂ© des Français, mais celui des mĂ©dias.

Ainsi, les quelques milliardaires qui se partagent le contrĂŽle des mĂ©dias sont en rĂ©alitĂ© ceux qui Ă©lisent le futur candidat. Pas vous, cher lecteur, navrĂ© de vous dĂ©livrer peut-ĂȘtre un petit Ă©lectro-choc.

Dans mon roman « Le PrĂ©sident Providentiel », c’est un candidat totalement inconnu du peuple qui se prĂ©sente. PlĂ©biscitĂ© par les mĂ©dias, le rĂ©sultat n’est pas surprenant.

Un petit outil Ă  disposition

Les fichiers du CSA Ă©tant assez indigestes pour le citoyen lambda, je mets Ă  disposition un petit outil pour visualiser les temps de parole des candidats. Il s’agit de graphes qui permettent de voir d’un seul coup d’Ɠil le gouffre qui sĂ©pare les « baleines » des « sauterelles », pour reprendre l’analogie du blog « Notre Époque ».

Pour y accĂ©der, cliquer sur l’image ci-dessous :

On va me dire qu’il y a bien paritĂ© pour les 4 ou 5 premiers candidats. Mais il faut se rendre Ă  l’Ă©vidence, tous sont extrĂȘmement clivants. Par ailleurs, ils se ressemblent tous sur les sujets les plus essentiels :

  • crĂ©ation monĂ©taire,
  • Ă©vasion fiscale,
  • rĂ©partition des richesses,
  • corruption,
  • souverainetĂ© nationale,
  • impuissance du peuple.

OĂč sont les rares candidats qui pourraient changer quelque chose Ă  ces points essentiels ? Ils obtiennent littĂ©ralement mille fois moins de temps de parole que les autres. Autant dire que, pour qu’ils soient Ă©lus, il faudrait un miracle, une licorne statistique, de ce genre :

VisualisĂ© ainsi, c’est dĂ©jĂ  beaucoup plus clair.

Conclusion

La fameuse « paritĂ© des temps de parole » est une vaste farce. Il n’y a strictement aucune paritĂ©, tout le temps de parole est donnĂ© aux futurs vainqueurs Ă©lus par les mĂ©dias.

OĂč sont donc les « autoritĂ©s » censĂ©es s’assurer du « bon fonctionnement » de la RĂ©publique ? Mais que fait la police ? Comment croire encore Ă  la « dĂ©mocratie » pourtant dans toutes les bouches ?

Archive Web – Notre Époque – Élections et temps de parole – Partie 4

Le blog d’origine ayant malheureusement disparu, je reproduis ici le post d’origine. Il est normalement encore disponible sur l’archive de l’internet.

Médias et élections (4) : Internet et temps de parole médiatique

 

Archive Web – Notre Époque – Élections et temps de parole – Partie 3

Le blog d’origine ayant malheureusement disparu, je reproduis ici le post d’origine. Il est normalement encore disponible sur l’archive de l’internet.

L’effrayante corrĂ©lation entre temps de parole et rĂ©sultats des Ă©lections (3) : les mĂ©canismes

 

Archive Web – Notre Époque – Élections et temps de parole – Partie 2

Le blog d’origine ayant malheureusement disparu, je reproduis ici le post d’origine. Il est normalement encore disponible sur l’archive de l’internet.

L’effrayante corrĂ©lation entre temps de parole et rĂ©sultats aux Ă©lections (2) : la confusion des experts

 

Archive Web – Notre Époque – Élections et temps de parole – Partie 1

Le blog d’origine ayant malheureusement disparu, je reproduis ici le post d’origine. Il est normalement encore disponible sur l’archive de l’internet.

L’effrayante corrĂ©lation entre temps de parole et rĂ©sultats aux Ă©lections (1)

 

Effondrement historique du PIB en France et en Europe

Tous les grands médias caracolent actuellement avec des gros titres :

  • hausse historique du PIB en 2021,
  • du jamais vu depuis 50 ans,
  • etc.

Au-delà de ces titres-dont-je-tairai-le-but, la réalité est bien différente.

Effondrement historique du PIB en 2020

Comme on le sait tous, le PIB a chutĂ© en 2020 un peu partout dans le monde. En particulier, il a reculĂ© de 6,4 % dans la zone euro. En France, encore plus, il a chutĂ© d’environ 8 %.

La fameuse « hausse historique » de 5,2 % en 2021 en Europe est donc vue sous un autre angle lorsqu’on garde en tĂȘte la succession des annĂ©es. Sortons notre calculette :

(100 – 6,4) × 1,052 = 98,47

soit une baisse sur deux ans de 1,53 %.

En France, si on fait le mĂȘme calcul, on a droit Ă  une baisse de 1,56 % sur deux ans.

Mais ce n’est pas tout.

Injection massive de monnaie par la BCE

Face Ă  l’arrĂȘt de l’Ă©conomie en 2020, la Banque Centrale EuropĂ©enne a dĂ©cidĂ© de ne pas y aller de main morte.

AprĂšs tout, elle commence Ă  en avoir l’habitude. Cela fait presque une dĂ©cennie qu’elle injecte rĂ©guliĂšrement de la monnaie dans la sphĂšre financiĂšre par le mĂ©canisme de l’assouplissement quantitatif (QE – Quantitative Easing en anglais). Et l’euro ne s’en porte pas plus mal, du moins en apparence. Alors, pourquoi ne pas y aller franchement ? Au fond, il s’agit de « sauver l’Ă©conomie ». Ou plus exactement la sphĂšre financiĂšre, mais chut.

Il me semble que le blog creationmonetaire.info est l’un des seuls, si ce n’est le seul, Ă  nous donner des graphiques de l’Ă©volution de la masse monĂ©taire en euro. Celui-ci est particuliĂšrement parlant :

Masse monétaire euro
Source : https://www.creationmonetaire.info/2022/01/masse-monetaire-e-janvier-2022-les-15000-milliards-depasses-le-rsa-au-plus-bas-de-tous-les-temps.html

Depuis mars 2020, c’est-Ă -dire moins de 2 ans, la BCE a injectĂ© la bagatelle de 20.000 milliards d’euros dans l’Ă©conomie. 10 fois le PIB de la France.

À masse monĂ©taire constante, le PIB a donc dĂ©jĂ  reculĂ© de 1,5 % en deux ans. Mais si on tient compte du gonflement de presque 20 % de la masse monĂ©taire dans le mĂȘme temps, alors la conclusion s’impose :

en deux ans, le PIB a reculé de 20 %.

Il s’agit donc d’un effondrement historique du PIB, contrairement Ă  ce qu’on veut bien nous faire croire, en pleine pĂ©riode Ă©lectorale.

Inflation

J’indiquais en 2016 dans mon livre « La monnaie : ce qu’on ignore » que les QE successifs n’avaient eu qu’un trĂšs faible impact sur l’inflation :

Or, malgrĂ© l’augmentation constante et soutenue de la masse monĂ©taire, l’inflation officielle dans l’Union EuropĂ©enne sur 10 ans est d’environ 2 % par an, guĂšre plus de 25 % en 10 ans, soit un quart de la hausse de la masse monĂ©taire (pour rappel, la masse monĂ©taire M1 a doublĂ© dans les 10 derniĂšres annĂ©es et la monnaie fiduciaire a mĂȘme quadruplĂ© en 15 ans).

Il semblerait tout de mĂȘme que la derniĂšre folie de nos banquiers centraux commence Ă  porter ses fruits : partout, « on craint » une inflation record en 2022. La question est : qui donc craint cette inflation ?

La rĂ©ponse est simple : le petit Ă©pargnant, le salariĂ© qui ne va pas voir son salaire suivre la courbe de l’inflation, le petit commerçant qui va devoir racler sur ses marges dĂ©jĂ  inexistantes pour ne pas trop perdre de clientĂšle, etc.

L’État, lui, en sort grand gagnant. Il pourra de toute façon relever les taxes et autres impĂŽts. En effet, il suffira de justifier qu’ils sont indexĂ©s par dĂ©faut sur l’inflation. Mais surtout, il voit sa dette fondre comme neige au soleil.

À lire aussi sur le sujet, cet autre rĂ©cent billet sur le petit jeu de la BCE.